21 heuress
SSur un promontoire dominant la ville la courbe du fleuve se dresse la citadelle d’exil comme une bosse d’infamie sur l’échiné de la cité zone interdite de silence et d’attente Voilà le grand portail de fer la muraille les tours de contrôle et les factionnaires Mais que se passe-t-il d’inaccoutumé ce soir dans la citadelle d’exil pour que les horloges se remettent à sonner l’heure pour que des cliquetis taraudent le silence pour que des pas crépitent dans les couloirs pour qu’un chant de joie fuse et s’étouffe dans le brouhaha des rires qui s’approche s’approche bute contre le portail qui cède s’ébranle s’ouvre comme un détroit aérant deux continents ? Un homme enjambe le seuil sort puis un autre Ils sont une vingtaine et personne ne les retient plus personne ne les surveille Les gardiens n’ont plus que la hâte de refermer le portail qui se ferme pour que refleurisse le cœur de vingt hommes libres oui libres Le vent se lève tiède et sucré L’espace sans clôture donne envie de courir jusqu’à l’épuisement Le ciel est donc ainsi cette vastitude d’étoiles dont on peut presque palper les rayons la terre spongieuse l’herbe du coton et la houle des libertés à l’horizon
À l’écart du groupe un homme se tait titube sous la clarté lunaire
Il ne sait pas s’il doit rire ou pleurer
Il sent la citadelle d’exil comme un monstre terrassé derrière son dos mais auquel il est encore rivé par mille liens invisibles
Il reste longtemps ainsi puis une lueur zèbre ses yeux
Il ramasse toute son énergie avance d’un pas ferme s’éloigne pour rattraper le groupe qui a entamé la descente vers la cité les retrouvailles le torrent de vie
Gongs d’annonce tambours témoins Ô battez résonnez battez La nuit avance Racontez racontez l’histoire des sept crucifiés de l’espoir