état de violence
alerte
alerte strident mouche trombe alerte
alerte lime cœur tapisse barbelés alerte
alerte roue rabot étrangle voix alerte
alerte crasse justice parque enfants alerte
alerte danse sphinx dents viscères alerte
alerte pâte sang claque digne
troupeaux de soleils nocturnes
la détresse comme un avion à pic l’incendie avance
sur les digues de manifestants
bleus de gaz et tam-tams
triques
briques
armes sauterelles descends alors
c’est la rue et pétarade
pour la veille d’un sursaut païen
belliqueux
et roide déracine lichen
décolle lichen occis ventouses
tendons calcaires
galope
siècle impur tes squelettes nous rouillent
suspendus à une voirie de singes et de nouveaux chariots poussent
ton métal rougi au fer je t’insulte
règne de bouledogues citadelles policières
de matraques à mon peuple
mon colosse n’a pas les pieds d’argile mon colosse ricane ses dents d’or et de platine mon colosse a enlevé le turban mon colosse sait nouer sa cravate mon colosse aime les chiens de luxe mon colosse sait parler aux dames mon colosse choisit ses cigares mon colosse flirte avec les journalistes mon colosse fait des choses avec la statue de la Liberté
mon colosse rédige lui-même ses discours mon colosse fait la prière et le ramadan mon colosse a l’œil larmoyant quand on parle du peuple mon colosse commande le marbre de sa statue mon colosse
mes colosses nous sommes à l’ère colossale des miniatures retouchées
galope galope
mon œil et ma nuit compose ma litanie de Kaâba saoule passe la flûte allègre passe la pipe à tête d’or
chercheuse d’hallucinations fume et crache
crache et retourne ton crachat creuse ta patience mets-lui des bandelettes
du scotch sur les oreilles tais-toi
galope
ma gazelle
mon antilope d’étoiles
galope ma coupe de sel morte après la nuit mon petit pays de lions
les autres à peine hommes ou femmes galope
ma confortable hérédité de mâle fais la belle
ma petite terre de contrastes l’ethnologue et l’érudit arrivent les dons de farine et de médicaments arrivent fais la roue mon petit pays de catons et de brutus on va faire de la photo artistique tu auras ton portrait dans un musée vivant bien encadré
avec légende scientifique ne crie pas mon petit pays de légendes voyons ne gueule pas ta faim ne demande pas l’aumône dans les grands cafés ne montre pas ton visage de tripes
tes guenilles les gentils touristes vont arriver tu auras la menue monnaie en devises lourdes galope
sceau au nombril ta généalogie de portefaix et de bonne à tout faire ta généalogie de gardiens de cimetières un peu de pudeur pas de manifestations
de troubles qui profitent à nos ennemis raisonne
réfléchis
analyse écoute-moi
regarde-moi
aie confiance en moi je suis instruit moi
je connais mieux que toi ton intérêt cotisons-nous
donne ton sou
ta peau de mouton de fête
galope
slogans dehors
jouons
jouant
joué
c’est le progrès
le cours irréversible de l’Histoire
bravo
merci
dehors
deux par deux
prenez vos distances
fixe
rompez les rangs
cassez la baraque
attrapez-le par le conduit de l’âme
qu’attends-tu
qu’attendez-vous
je bâille
tu bâilles
nous bâillons
j’ai peur
je ne fais pas de politique
je suis un militant vigilant et lucide
trop tôt encore
ramassez les cadavres
quel gâchis
ces balles perdues
dans un cœur
dans une tempe
dans une dentition gâtée
galope galope
ma torrentielle clarté canalise borborygme de mes râles voilà ma chute
mon souffle
statisticien de douleurs d’échecs
de tentatives routes et carrefours bigles
dragées au pavot
au sésame et déchets de kif
ombilic rouge d’avortements c’est l’Afrique en halte et là
sur la paume
là-devant
la petite Afrique aux balafres
dénombré manquant mort
d’avoir trop crié il était une fois
moi
un millénaire d’époques plus tard caravane ou homme le faciès à peine érodé
les mains en stalactites et seul ce parfum aigre d’un suaire
d’un motif bleu
sur la face momifié
dans une course contre d’autres planètes le nom perdu
cloué à d’autres himalayas décroché par un titan déclaré enjeu d’une partie de cache-cache
entre dieux en crise d’adolescence
énergies damnées en éruption noirs
jaunes
blancs
rouges c’est un certain dialecte
que je vous parle un idiome pustuleux de signes nœud de perches
d’arches
et de balles tout avili me reconnaîtra
pour sien j’ai parlé