Catalogue du seul

Achille Chavêe
par Achille Chavêe
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Les symboles étaient exsangues

on ne savait que dire

il valait mieux se taire

il avait plu

neigé

des lambeaux de mémoire pourrie

Il nous faut perdre la raison

pour la redécouvrir

intacte

le jour où l’on sait bien

qu’il ne sera valable d’en user

qu’à des fins secondaires

La nuit aux lèvres épaisses et brunes

la nuit à la pointe de seins de
Ténériffe

la nuit de violette

qui mérite un coup de poignard

dans sa merveilleuse poitrine de toujours

la nuit

qui pour moi ne sait jamais mourir

ni s’éveiller absolument nue

la nuit cette fille par instants éperdue

que chevauche mon amour

Ô fille ô nuit

tu te trouves toujours au rendez-vous

avec ton droit congénital

de me faire trébucher dans ton abîme

de me prouver la loi des crépuscules

de me renouveler selon tes longitudes

ô nuit avec ton grand spasme d’impossible

qui me prouve l’Obscur

Il eût fallu ne pas venir

ne pas paraître

ne pas penser

ne pas savoir

ne rien connaître

demeurer pierre parmi les eaux

Il eût fallu surtout ne pas être poète

c’eût été plus rassurant

plus pur

bien mieux acquis définitivement

Le temps est un petit morceau de la mémoire de l’insecte dont je sauve en secret la vie

le temps est ce fameux havane que fume le papillon mourant dans l’aurore incommunicable

le temps est une goutte d’eau dans ce vaste océan de larmes qui finance l’éternité

le temps nous y réfléchissons est notre cœur inhabitable la cage des secondes mortes

La table avait cent mètres de long et nous étions assis mon interlocuteur et moi à chacun de ses bouts

Le service était fait par un ange un bel ange

aux longues ailes de libellule au tablier brodé de pureté

Nous correspondions par télépathie
Il convient que je le précise mon convive était un poète nos aliments étaient à base de bonté

Il y a toujours une très vieille armoire

perdue

et ne contenant rien

sauf cette indélébile odeur

de passé

de ce passé qui pour toujours est effacé

Je m’introduis et je séjourne

un an ou dix mille ans

dans son obscurité secrète et mûre

J’y efface mon nom

j’y suis de minuscule taille

Tout s’abolit

je me nourris de sa poussière

et je me borne à prononcer

les quelques mots magiques

que j’ai pu retenir du temps de mon enfance

Achille Chavêe

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