Catalogue du seul
Les symboles étaient exsangues
on ne savait que dire
il valait mieux se taire
il avait plu
neigé
des lambeaux de mémoire pourrie
Il nous faut perdre la raison
pour la redécouvrir
intacte
le jour où l’on sait bien
qu’il ne sera valable d’en user
qu’à des fins secondaires
La nuit aux lèvres épaisses et brunes
la nuit à la pointe de seins de
Ténériffe
la nuit de violette
qui mérite un coup de poignard
dans sa merveilleuse poitrine de toujours
la nuit
qui pour moi ne sait jamais mourir
ni s’éveiller absolument nue
la nuit cette fille par instants éperdue
que chevauche mon amour
Ô fille ô nuit
tu te trouves toujours au rendez-vous
avec ton droit congénital
de me faire trébucher dans ton abîme
de me prouver la loi des crépuscules
de me renouveler selon tes longitudes
ô nuit avec ton grand spasme d’impossible
qui me prouve l’Obscur
Il eût fallu ne pas venir
ne pas paraître
ne pas penser
ne pas savoir
ne rien connaître
demeurer pierre parmi les eaux
Il eût fallu surtout ne pas être poète
c’eût été plus rassurant
plus pur
bien mieux acquis définitivement
Le temps est un petit morceau de la mémoire de l’insecte dont je sauve en secret la vie
le temps est ce fameux havane que fume le papillon mourant dans l’aurore incommunicable
le temps est une goutte d’eau dans ce vaste océan de larmes qui finance l’éternité
le temps nous y réfléchissons est notre cœur inhabitable la cage des secondes mortes
La table avait cent mètres de long et nous étions assis mon interlocuteur et moi à chacun de ses bouts
Le service était fait par un ange un bel ange
aux longues ailes de libellule au tablier brodé de pureté
Nous correspondions par télépathie
Il convient que je le précise mon convive était un poète nos aliments étaient à base de bonté
Il y a toujours une très vieille armoire
perdue
et ne contenant rien
sauf cette indélébile odeur
de passé
de ce passé qui pour toujours est effacé
Je m’introduis et je séjourne
un an ou dix mille ans
dans son obscurité secrète et mûre
J’y efface mon nom
j’y suis de minuscule taille
Tout s’abolit
je me nourris de sa poussière
et je me borne à prononcer
les quelques mots magiques
que j’ai pu retenir du temps de mon enfance