Pour mieux aimer à irène hamoir
Dans la beauté menacée
menaçante
il y a place encore pour un duel désespéré
et pour la fuite éperdue d’une gazelle
dans les savanes du rêve
Dans la beauté menacée
menaçante
il y a place toujours pour une femme
prisonnière dans la cloche de cristal
qui sonne son temps d’être perdue
et d’être aimée
chaque fois que ses seins se mettent à luire
comme des cibles de phosphore
Dans la beauté menacée
menaçante
il y a place pour un lit de corail
toujours sanglant sous le baiser de l’œil
et pour un échafaud de papier rouge
il y a place encore
pour les corolles de la solitude
bouquet qui se fane dans un soleil d’arrière-saison
Dans la beauté menacée
menaçante
il y a place pour une statue aux vaincus
refusant de civiliser les vainqueurs
et pour une grande avenue de marbre noir
se perdant dans les sables de l’avenir
Il y a place encore pour un musée
qui n’ouvre que la nuit
avec ses fantômes assermentés qui trichent au poker
et des souris d’hôtel fuyant dans les galeries
en maillot noir
collant comme le vice
Dans la beauté menacée
menaçante
il y a place encore et toujours
pour un décor d’intempéries mentales
comme la pluie rouge d’angoisse
l’orage des prédestinations
pour un trou mutilé
faisant figure de symbole
et pour quelques reproductions légères
dans le goût triomphant du jour
Dans la beauté menacée
menaçante
il y a place pour un alibi d’épave
un cimetière de rire
pour un faux timbre-poste
un vrai clou un nénuphar
il y a place enfin et toujours
pour tous les cataclysmes naturels sexuels et sociaux
qui font un levain de révolte
de la sciure de cadavre
5 septembre 1941