La taverne
La coupe révèle ses rondeurs
et gagne en qualificatifs
Elle se déguise avec sa robe d’amante
et du haut de ses balcons répand les roses
Quand je suis seul avec elle
après minuit
elle pique une tulipe
dans sa tresse au repos
et m’ouvre les avenues et sa poitrine
rit de ma face
légèrement ronde
Nous échangeons un baiser
Ah. sa joue si froide quand elle prend ses distances
et qu’entre elle et moi se dresse
la voix du muezzin :
les turbans poussent comme des champignons
des étoiles sur les épaulettes des généra
comme les prisons qui remplissent l’espace
entre
Rabat et
Sanaa
comme les ponts qui ont dynamité
la ligne
Bar-Lev
Où est la route de
Jabal ach-Chikh ?
Elle se gratte sous les sourcils
allume la cigarette
des clients agglutinés
C’est ainsi que la saveur du vin vieilli change
Ceuta passe entre la cigarette et le tabac
Entre moi et les clients agglutinés
tombe une chanson
Ah…
Les ailes de la chanson se déploient prennent la forme des visages qui s’éclairent autour des tables :
–
Veux-tu un peu d’amandes ?
–
Tes yeux sont bavards
–
Je t’ai connue avant de passer la douane…
Ceuta
Mon interlocutrice aime danser
De sa blessure, elle arrache un sourire
et chante
pour que la mélodie se réfugie dans la mémoire
La moitié de la bouteille suffira
si le bar ferme ses portes
et que nous aboutissions au couloir
du flux et reflux
et des faux pas de la jeunesse
La coupe se déleste de ses noms
et gagne en qualificatifs
Elle se déguise avec une tenue de prisonnier
et répand les roses du haut de ses balcons