Dit d’errance
Tout ce qui jamais fut déchiré en moi s’est déchiré tout ce qui jamais fut mutilé en moi s’est mutilé
au milieu de l’assiette de son souffle dénudé le fruit coupé de la lune toujours en allée vers le contour à inventer de l’autre moitié
Et pourtant que te reste-t-il du temps ancien
à peine peut-être certain sens
dans la pluie de la nuit de chauvir ou trembler
et quand d’aucuns chantent
Noël revenu
de songer aux astres
égarés
voici le jour le plus court de l’année
ordre assigné tout est du tout déchu
les paroles les visages les songes
l’air lui-même s’est envenimé
quand une main vers moi s’avance
j’en ramène à peine l’idée
j’ai bien en tête la saison si lacrimeuse
le jour avait un goût d’enfance
de chose profonde de muqueuse
vers le soleil mal tourné
fer contre fer une gare vide
où pour prendre rien
s’enrouait à vide à toujours geindre le même bras
Ciel éclaté courbe écorchée de dos
d’esclaves fustigés peine trésorière
des alizés grimoire fermé mots oubliés
j’interroge mon passé muet
Ile de sang de sargasses
île morsure de rémora
île arrière-rire des cétacés
île fin mot de bulle montée
île grand cœur déversé
haute la plus lointaine la mieux cachée
ivre lasse pêcheuse exténuée
ivre belle main oiselée
île maljointe île disjointe
toute île appelle
toute île est veuve
Bénin
Bénin ô pierre d’aigris
Ifé qui fut
Ouphas
une embouchure de
Zambèze
vers une
Ophir sans
Albuquerque
tendrons-nous toujours les bras ?
jadis ô déchiré
Elle pièce par morceau rassembla son dépecé et les quatorze morceaux
s’assirent triomphants dans les rayons du soir.
J’ai inventé un culte secret
mon soleil est celui que toujours on attend
le plus beau des soleils est le soleil nocturne
Corps féminin île retournée
corps féminin bien nolisé
corps féminin écume-né
corps féminin île retrouvée
et qui jamais assez ne s’emporte
qu’au ciel il n’emporte
ô nuit renonculée
un secret de polypier
corps féminin marche de palmier
par le soleil d’un nid coiffé
où le phénix meurt et renaît
nous sommes âmes de bon parage
corps nocturnes vifs de lignage
arbres fidèles vin jaillissant
moi sibylle flébilant.
Eaux figées de mes enfances
où les avirons à peine s’enfoncèrent
millions d’oiseaux de mes enfances où fut jamais l’île parfumée de grands soleils illuminée la saison l’aire tant délicieuse l’année pavée de pierres précieuses ?
Aux crises des zones écartelé en plein cri mélange ténébreux j’ai vu un oiseau mâle sombrer la pierre dans son front s’est fichée je regarde le plus bas de l’année
Corps souillé d’ordure savamment mué espace vent de foi mentie espace faux orgueil planétaire lent rustique prince diamantaire serais-je jouet de nigromance ?
Or mieux qu’Antilia ni que
Brazil pierre milliaire dans la distance épée d’une flamme qui me bourrelle j’abats les arbres du
Paradis