Sur l’état de l’union
J’imagine au
Congrès ce message sur l’état de l’Union :
situation tragique,
plus ne nous reste au sous-sol que 75 ans de fer 50 ans de cobalt
mais pour 55 ans de soufre et 20 ans de bauxite au cœur quoi ?
Rien, zéro,
mine sans minerai, caverne où rien ne rôde, de sang plus une goutte.
EMMET
TILL
tes yeux étaient une conque marine où pétillait la bataille
devin
de ton sang de quinze ans.
Eux jeunes n’avaient jamais eu d’âge,
ou plutôt sur eux pesaient,
plus que tous les gratte-ciel, cinq siècles de tortionnaires
de brûleurs de sorcières,
cinq siècles de mauvais gin de gros cigares
de grasses bedaines remplies de tranches de bibles rancies
cinq siècles bouche amère de péchés de rombières,
ils avaient cinq siècles
EMMET
TILL,
cinq siècles est l’âge sans âge du pieu de
Caïn.
EMMET
TILL je dis: au cœur zéro, de sang pas une goutte, et pour le tien qu’il me cache le
Soleil, qu’à mon pain il se mêle :
– «
Garçon de
Chicago c’est-il toujours vrai que tu vaux autant qu’un blanc ? »
Printemps, c’est à toi qu’il croyait.
Même au bord de la nuit, au bord du
MISSISSIPI roulant entre les hautes berges de la haine raciale ses barreaux, ses barrières, ses tombales avalanches.
Au printemps affluant ses rumeurs dans le hublot des yeux.
Au printemps huchant la panique aumaille dans les savanes du sang.
Au printemps dégantant ses fines mains parmi un éclat de coques et de siliques,
délieur des caillots à peur, dissolveur des caillots de la haine gonflée d’âge et au fil des fleuves du sang charriant la hasardeuse rubrique des bêtes de l’affût.
Mais
Eux eux étaient invulnérables, tardifs qu’ils étaient, et montés, massifs, sur de louches boucs immémoriaux
– «
GARÇON
DE
CHICAGO »…
Autant en emporte le béguètement du vent racial
Lui écoute dans le bleu buisson des veines
chanter égal l’oiseau-sang, devine par-dessus les berges à sommeil monter dans le bleu champ surprenant
Soleil, ton pas furtif, poisson véhément.
Alors la nuit se souvint de son bras
mou vol de vampire qui tout soudain plana
et le gros coït de
BIG
MILLAM
sur le noir mur vivant
en lettres de rouille écrivit la sentence et l’état de l’Union :
20 ans de zinc
15 ans de cuivre
15 ans de pétrole
et l’an 180 de ces états
mais au cœur indolore horlogerie
quoi, rien, zéro,
de sang pas une goutte
au carne blanc cœur désinfecté ?