Dénigrement
Mon dernier livre, je le brûle,
assombri, haletant.
Je ne suis plus qu’un crépuscule,
et je n’ai pas le temps
de me lever.
Je porte en terre ma nuque avec mon cou.
Une racine est solidaire de mes jambes : debout,
assis, couché, la peur me souille
et je dois me quitter.
Je crois que j’envie les grenouilles
dans leur indignité.
Je ne suis plus qu’une mâchoire
tombée dans l’intestin.
La pluie ne parle pas de gloire,
ni la boue de destin.
C’est en moi-même que je rampe, m’étant coupé les mains.
La tourterelle et l’hippocampe ont d’autres lendemains ;
je me souviens : jadis ils furent mes plus chers compagnons,
avec l’iris; quelle aventure pour ce pauvre trognon,
ce corps qui n’est plus corps, cette âme
dont s’échappe l’esprit !
Faut-il crier ?
Je vois des flammes,
et le néant sourit.
Pourtant, j’aimais les marguerites,
le fleuve adolescent, le scarabée.
La mort hésite
car un reste de sang
parvient encore à ma poitrine,
comme un pauvre aliment,
L’azur s’effondre ; on le devine :
je suis son excrément.