J’oublie
En
Flandre, au bord d’un fleuve,
une femme jadis
m’a dit : «
Pour toi j’arrête les rivières. »
J’oublie.
Au
Nebraska, par mille blés de fond,
une femme jadis
m’a dit : «
Je suis ta seule nourriture. »
J’oublie.
A
Londres sous les bombes,
une femme jadis
m’a dit : «
Je suis ta capitale
et ton chef-lieu et tes faubourgs. »
J’oublie.
A
Berlin, à l’époque
des après-guerre,
des avant-guerre,
une femme, je crois, m’a dit :
«
Je suis l’instant vécu
que sans cesse tu dois revivre. »
Sous un pont à
Venise, une femme
m’a dit :
«
Je suis ton masque et ton miroir brisé. »
J’oublie.