Tendresse
Après le désespoir vient la tendresse,
comme il sied aux vieillards.
Je suis joyeux, je me redresse
et je m’adonne à l’art.
Je parle aux fleurs.
J’entretiens les comètes.
J’écoute la chanson qu’un saxophone me répète :
«
Ensemble nous pensons… »
Je monologue avec une peinture
ou les statues de sel.
Que sont mes amours les plus pures ?
Je ne sais pas lequel
de nous : l’ancien jeune homme ou son ancêtre,
habite sous ma peau.
L’être défait par le non-être,
mes amis principaux,
je les confonds parfois.
Un personnage
sort de chaque récit ; je ne suis pas atteint par l’âge :
je lui demande si
je peux lui ressembler : un frère, en somme,
dans le jeu incertain de ma survie.
Je caresse une pomme,
jalousant un destin
d’objet si rond !
Puis je rentre au poème,
où c’est moi qui m’attends, affable, ironique, verbal ; je m’aime,
de vivre hors de mon temps.