Un art de la métamorphose
Je voulais infléchir l’Histoire, à mes débuts et marquer mon époque.
Je ne sais pas quel sang j’ai bu, mais je suis équivoque
comme un enfant qui devient un vieillard.
Soudain aveugle, il s’interroge ; tout dans sa vie est anodin, où le blâme et l’éloge
ont la même apparence : un arbre desséché.
Je ne puis me refaire, chaque vertu étant péché, et l’âme délétère.
J’avais l’alternative : être bon pour autrui ou m’estimer moi-même.
Ce faux combat reste sans fruit : je me méfie, je n’aime
que le passage entre le pain et le poison ; je suis ce qu’on me prête, une dépouille à l’horizon, une forme incomplète
où je souffre et pourtant ne sais ce qu’est souffrir
Dans mon indifférence la chair n’a pas de repentir; aucun esprit ne pense.
Je devrais vaincre enfin ma détresse et ma peur; me voilà oiseau-lyre au seuil d’un univers meilleur.
Il suffisait de lire
les lignes de ma main, l’azur de mon regard ; un poème, une prose me rendent ma nature : un art de la métamorphose.