Pour en finir avec la journée
1
Grande barrière muette
Qui ose vous franchir aujourd’hui
On a beau se déchaîner sous le couven des vagues
Le cœur n’y est pas
Les mains trop immobiles
On recherche partout les raisons d’une halte
Les sentiments s’effritent dans le noir
Goutte à goutte
Demain ce sera la hargne rieuse
Nul téléphone ne pourra traverser ce silence
Le déjeuner du matin perpétuera la goinfrerie d’un survivant
2
Un troupeau d’éléphants me surpeuple
Envie d’avaler l’océan
Envie d’avaler la mort
Envies archéologues
Ma volonté en forme de gueule de pierre
Pourquoi rester enfant sur le seuil
La vraie vue on l’acquiert à l’intérieur
Le dedans du monde serre les dents
C’est en se jetant hors de sa bouche qu’on l’entend
Allez fainéants de week-end
Allez, debout
La terre réclame son volcan
3
Un rien me terre sous la pieuvre
Une poussière de rancœur tombe sur mes cils
Déjà l’univers me glace
On me dit
Vous énervez les gens
Oui —
La mort aussi
On me dit
Le gris sera votre seul bien
Oui —
Griserie
On me dit
Les jeux sont faits
Non —Je démens formellement cette blague
La roulette elle-même est châtrée
Toute élégance a ses mites
La mienne est contraire à la porcelaine
Je nie la marée mais la mer me supporte
La barque de ma vie s’est retournée
4
Votre vérité est un coup du sort
Ne diminuez jamais l’intensité du flux
Augmentez-vous
Tout vous est bon
Ne croyez pas à l’Histoire
Ne respectez aucune gloire
Votre rire est à ce prix
Mais dans ce sourire nulle sagesse
Nulle mesure dans vos gestes
Que la terreur vous soit familière
Soyez méchant dans votre amour
Allez trop loin
L’indécence est votre seule grandiloquence
5
C’est votre voix cintre de chair
C’est cette erreur ce privilège et ce besoin
Rien d’autre ne les remplace
Rien d’autre ne les soumet
C’est votre urgence
C’est ce qui soulève
C’est ce qui met hors du monde
N’hésitez pas
L’ascension la mort tout se décide à cet instant
Ceux qui tournent la tête comme un refus Évitez-les
Vous êtes seul à pouvoir jeter leurs dés
6
Liberté à trois milliards de têtes
L’univers n’est pas ton professeur
7
pourquoi projeter sa colère au-dessus des pages
raz-de-marée muet
stoppé par un vent toujours contraire
peut-être un homme surgira-t-il un balanceur de béquilles sur le seuil je lui dirai
Vous êtes ma conscience — et le tour sera joué
avoir été une île ne contente pas le continent
je dirai plus tard j’ai
CRIÉ
mais jamais un mot jamais un cri jamais mille mots jamais mille cris ne suffiront à faire déborder la coupe avare du poème
haute couronne hystérique sur l’autel de la journée