Tu ne comprends pas, tu comprends
1
tu ne comprends pas dis-tu
tu t’étonnes menton en avant
que je m’emmêle et m’encombre d’excuses
alors que la décision est prise
que toutes les portes en moi sont dévergondées
que deux mois ont retourné ma peau
mais tu comprends en même temps tu me guides en ce dédale glauque tu danses sur le seuil de ta confusion
et je te vois
aigle blanc, aigle-femme sur ta branche
épier la faiblesse du moment
prête à taillader d’un coup la perfection
un siècle entiet double ma colère quelque chose nous égalise sans pitié n’attends pas que le siècle ait capoté j’ai la mort pendue à tes basques ta confiance peut m’en défatiguer
2
cet as de pique en forme de cœur je l’offre
à tes essaims de douceur
ce vin d’ombre et de complicité
je l’offre aux crimes que tu n’as pas commis
ces violettes cueillies sut la pente
je les offre à ton indifférence
ce poème sans titre sans passeport sans année
je l’offre à ce qui te fuit
ces morceaux de nuit qui grincent entre tes dents
je les offre à ta patience
ce non ce oui que je ne dis pas
je les offre à ton silence
écoute-moi te donner
3
je ne sais
si ce boa d’étoiles jeté sur tes épaules
si cette ribambelle de feux follets sur la colline noire
je ne sais si cela tarit ta soif
je ne sais matraque de velours
si les nerfs noués en échelles de cordes
si l’exaspération notée dans ton carnet de voyage
je ne sais matraque de velours
si cela déborde ton désir
je ne sais
si mes chiens lâchés en rase campagne par temps gris
si les douves vidées de leurs regrets
si l’excès de ma patience
n’ont pas fait reculer les limites de ta crainte
je ne sais — regard traversé à gué — si le soleil tenu en main surfît à t’éclairer