Le boucher

Albert Samain
par Albert Samain
0 vues
0.0

Ardagôn le boucher, à la rouge encolure,
Un grand couteau luisant passé dans sa ceinture,
Pousse hors de l’étable et conduit au hangar
Le bœuf sur qui la vache attache un long regard.
Les enfants du village, et Psyllé la première,
Déjà chassés vingt fois par la rude fermière,
Reviennent plus nombreux et plus hardis encor
Que les mouches qu’attire un pot plein de miel d’or.
Une corde passée à l’anneau de la dalle
Incline par degrés la tête bestiale,
Et la brute immobile offre son large front
Comme une enclume où va frapper le forgeron.
Tout est prêt. Dans la cour descend un grand silence…
Le lourd marteau levé lentement se balance,
Plane, hésite, et soudain, d’un coup terrible et sourd,
Tombe… le crâne sonne… Un léger frisson court.
Le bœuf assommé croule : et dans sa gorge inerte
Le grand couteau plongé fait par l’entaille ouverte
Jaillir à flots pressés un sang noir et fumant.
Le sol autour s’empourpre. Ardagôn, par moment,
Enfonçant jusqu’au coude un bras qui sort tout rouge
Ranime un peu de vie aux flancs du bœuf qui bouge ;
Et les enfants penchés sentent, en frémissant,
Leur petit cœur cruel réjoui par le sang.

Albert Samain

Qu’en pensez-vous ?

Partagez votre ressenti pour Albert Samain

Noter cette création
1 Étoile2 Étoiles3 Étoiles4 Étoiles5 Étoiles Aucune note
Commenter

Les poètes sont les gardiens des rêves. Rejoignez notre confrérie, comme un Rimbaud moderne, et rêvez avec nous.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


Découvrez d'autres poèmes de Albert Samain

Aucun poème populaire trouvé ces 7 derniers jours.

Nouveau sur LaPoesie.org ?

Première fois sur LaPoesie.org ?


Rejoignez le plus grand groupe d’écriture de poésie en ligne, améliorez votre art, créez une base de fans et découvrez la meilleure poésie de notre génération.