Réminiscences

Alphonse Beauregard
par Alphonse Beauregard
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Les deux amis à barbe grise,
La jambe croisée, en fumant,
En sont arrivés doucement,
La dernière nouvelle apprise,
À parler des choses d’antan.

Du fond de lointaines époques,
Comme un projecteur, leur esprit
Fait surgir des êtres chéris,
D’étranges mœurs, des mots baroques,
Des maisons de bois équarri.

Une date prend un visage,
La vie est leur calendrier.
– « Ce pauvre Anthime, le rentier,
Se noya pendant mon veuvage. »
– « C’est vrai, j’apprenais mon métier. »

L’amour instinctif de la race,
Plus accentué chez les vieux,
Les engage à parler de ceux
Qui venus d’eux prendront leur place,
Des alliés et des neveux.

On compare garçons et filles,
On fait l’inventaire des biens :
Plusieurs couples ont des moyens
Et font instruire leur famille,
Ce que ne pouvaient les anciens.

Alors, d’un ton où se devine
L’amertume d’un rêve enfui
Et la foi qu’une étoile a lui
Pour les fils, un des vieux opine :
– « Ah oui ! les jeunes d’aujourd’hui… »

Alphonse Beauregard

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