La guirlande
Je connais dans les bois, sur le front des montagnes,
La fleur qui sert d’asile aux songes incertains.
Cours, ô jeune beauté, dépouille les campagnes ;
Que leurs dons parfumés s’assemblent sous tes mains.
Hâtons-nous de former la guirlande légère
Qui doit rendre l’amour à tes vœux assidus ;
Hâtons-nous, le temps fuit, la fleur est passagère ;
Les songes et les fleurs demain ne seront plus !
Le songe de l’amour, vers la vierge timide,
S’élance chaque nuit de ce jasmin humide ;
Le songe de l’espoir, plus fidèle au malheur,
Et dont le chant magique assoupit la douleur,
Naît de cet amandier qui dans les airs balance
De ses rameaux fleuris la pompeuse imprudence.
Hâtons-nous, profitons de ces riants tributs ;
Les songes et les fleurs demain ne seront plus !
Cette fleur, où se cache une brillante image,
Teint des couleurs de l’or la dent du faon sauvage ;
La noire mandragore, en inspirant l’horreur,
Poursuit le meurtrier d’un fantôme vengeur.
Garde-toi d’approcher cette plante ennemie
Qui jette la terreur dans nos Sens éperdus.
Tressons, tressons ces fleurs ; hâtons-nous, jeune amie ;
Les songes et les fleurs demain ne seront plus !
Voici le cannellier à l’écorce odorante ;
Le songe du cœur pur qui l’habite le jour,
Oppose au noir soupçon la douceur caressante :
Ah ! ce songe puissant ramènera l’amour.
Hâtons-nous, hâtons-nous, achevons la guirlande ;
Les instants différés sont des instants perdus.
Cours, au front d’un amant, déposer ton offrande :
Les songes et les fleurs demain ne seront plus !