Jeune homme fou par amour
Il est fou, il est la fable de tous les jeunes
Cnidiens.
Pour lui ce
Praxitèle a, de sa main savante.
Des antres de
Paros fait sortir une amante ;
Car, malheureux rival d’Anchise et de
Paris,
Il aime ce beau marbre, image de
Cypris.
Il a su, se cachant au fond du sanctuaire,
Passer toute une nuit près de l’idole chère,
Dont les contours divins ont laissé voir au jour
La trace des fureurs d’un fol et vain amour.
Il est toujours au temple avec son immortelle.
Et là, seul, il la flatte, il lui dit qu’elle est belle,
L’appelle par des noms mielleux, tendres, brûlants,
Et parcourt à plaisir et son sein et ses flancs.
D’autres fois il arrive inquiet, irascible,
La gronde, la nommant dure, froide, insensible.
Lui dit qu’elle est de pierre et qu’elle est sans appas,
Puis lui pardonne, pleure, et la tient dans ses bras ; «Baise-moi», lui dit-il.
Et sa bouche insensée
Baise et presse longtemps cette bouche glacée,
D’un doux reproche encor la caresse ; et sa main
La punit mollement d’un injuste dédain.