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André Lemoyne
par André Lemoyne
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À Alex de Bertha.

L’absent qu’on n’osait plus attendre est revenu.
Sans bruit il a poussé la porte.
Son chien, aveugle et sourd, au flair l’a reconnu,
Et par la grande cour l’escorte.

L’enfant blond d’autrefois est un homme aujourd’hui.
Par delà l’Equateur sa trentaine est sonnée,
Et voilà bien dix ans qu’on n’a rien su de lui.
Par les soleils de mer sa peau rude est tannée.

Du vieux perron de pierre il monte l’escalier.
Les fleurs d’un chèvrefeuille antique
Versent, comme autrefois, leur baume hospitalier
Au seuil de la maison rustique.

Il hésite, il a peur, quand son pied touche au seuil.
C’est un pressentiment funèbre qui l’arrête :
Qui va-t-il retrouver ? les siens portant son deuil,
Ou des êtres nouveaux dont le cœur est en fête ?

On l’aperçoit d’abord : — « Quel est cet étranger
Qui chez les autres se hasarde
Sans éveiller la cloche, et semble interroger
Si gravement ceux qu’il regarde ? »

Servantes et valets ne le connaissent pas,
Mais la maîtresse, assise et près du feu courbée,
Se lève toute droite et lui tend ses deux bras.
En étouffant un cri de mère elle est tombée.

André Lemoyne

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