Le Panama ou les Aventures de Mes Sept Oncles

Blaise Cendrars
par Blaise Cendrars
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Des livres
Il y a des livres qui parlent du

Canal de

Panama

Je ne sais pas ce que disent les catalogues des bibliothèques
Et je n’écoute pas les journaux financiers

Quoique les bulletins de la

Bourse soient notre prière quotidienne
Le

Canal de

Panama est intimement lié à mon enfance…
Je jouais sous la table
Je disséquais les mouches
Ma mère me racontait les aventures de ses sept frères
De mes sept oncles
Et quand elle recevait des lettres
Ëblouissement!
Ces lettres avec les beaux timbres exotiques qui portent
les vers de

Rimbaud en exergue

Elle ne me racontait rien ce jour-là

Et je restais triste sous ma table
Cest aussi vers cette époque que j’ai lu l’histoire du tremblement de terre de

Lisbonne
Mais je crois bien
Que le crach du

Panama est d’une importance plus universelle

Car il a bouleversé mon enfance.
J’avais un beau livre d’images
Et je voyais pour la première fois
La baleine
Le gros nuage
Le morse
Le soleil
Le grand morse
L’ours le lion le chimpanzé le serpent à sonnettes et la
mouche

La mouche

La terrible mouche

Maman, les mouches! les mouches! et les troncs d’arbres!

Dors, dors, mon enfant.

Ahasvérus est idiot
J’avais un beau livre d’images
Un grand lévrier qui s’appelait

Dourak
Une bonne anglaise
Banquier
Mon père perdit les 3/4 de sa fortune
Comme nombre d’honnêtes gens qui perdirent leur
argent dans ce crach,

Mon père

Moins bête
Perdait celui des autres,

Coups de revolver.
Ma mère pleurait
Et ce soir-la on m’envoya coucher avec la bonne anglaise
Puis au bout d’un nombre de jours bien long..
Nous avions dû déménager
Et les quelques chambres de notre petit appartement
étaient bourrées de meubles

Nous n’étions plus dans notre villa de la côte

J’étais seul des jours entiers

Parmi les meubles entassés

Je pouvais même casser de la vaisselle

Fendre les fauteuils

Démolir le piano-Puis au bout d’un nombre de jours bien long

Vint une lettre d’un de mes oncles
C’est le crach du

Panama qui fit de moi un poète!
C’est épatant
Tous ceux de ma génération sont ainsi
Jeunes gens
Qui ont subi des ricochets étranges
On ne joue plus avec des meubles
On ne joue plus avec des vieilleries
On casse toujours et partout la vaisselle
On s’embarque
On chasse les baleines
On tue les morses
On a toujours peur de la mouche tsé-tsé
Car nous n’aimons pas dormir.
L’ours le lion le chimpanzé le serpent à sonnettes m’avaient appris à lire..
Oh cette première lettre que je déchiffrai seul et plus
grouillante que toute la création

Mon oncle disait

Je suis boucher à

Galveston

Les abattoirs sont à 6 lieues de la ville

C’est moi qui ramène les bêtes saignantes, le soir, tout
le long de la mer

Et quand je passe les pieuvres se dressent en l’air

Soleil couchant..
Et il y avait encore quelque chose

La tristesse

Et le mal du pays.
Mon oncle, tu as disparu durant le cyclone de 1895
J’ai vu depuis la ville reconstruite et je me suis promené au bord de la mer où tu menais les bêtes saignantes
Il y avait une fanfare salutiste qui jouait dans un kiosque en treillage
On m’a offert une tasse de thé
On n’a jamais retrouvé ton cadavre
Et à ma vingtième année j’ai hérité de tes 400 dollars d’économie
Je possède aussi la boîte à biscuits qui te servait de reliquaire
Elle est en fer-blanc
Toute ta pauvre religion
Un bouton d’uniforme
Une pipe kabyle
Des graines de cacao
Une dizaine d’aquarelles de ta main
Et les photos des bêtes à prime, les taureaux géants que
tu tiens en laisse

Tu es en bras de chemise avec un tablier blanc
Moi aussi j’aime les animaux
Sous la table
Seul
Je joue déjà avec les chaises
Armoires portes
Fenêtres
Mobilier modern-style
Animaux préconçus
Qui trônent dans les maisons
Comme la reconstitution des bêtes antédiluviennes dans les musées
Le premier escabeau est un aurochs!
J’enfonce les vitrines
Et j’ai jeté tout cela
La ville, en pâture à mon chien
Les images
Les livres
La bonne
Les visites
Quels rires!
Comment voulez-vous que je prépare des examens?

Vous m’avez envoyé dans tous les pensionnats d’Europe

Lycées
Gymnases
Université
Comment voulez-vous que je prépare des examens
Quand une lettre est sous la porte
J’ai vu
La belle pédagogie!
J’ai vu au cinéma le voyage qu’elle a fait
Elle a mis soixante-huit jours pour venir jusqu’à moi
Chargée de fautes d’orthographe
Mon deuxième oncle :
J’ai marié la femme qui fait le meilleur pain du district
J’habite à trois journées de mon plus proche voisin
Je suis maintenant chercheur d’or à

Alaska
Je n’ai jamais trouvé plus de 500 francs d’or dans ma
pelle

La vie non plus ne se paye pas à sa valeur!

J’ai eu trois doigts gelés

Il fait froid…
Et il y avait encore quelque chose

La tristesse

Et le mal du pays.
Oh mon oncle, ma mère m’a tout dit
Tu as volé des chevaux pour t’enfuir avec tes frères
Tu t’es fait mousse à bord d’un cargo-boat
Tu t’es cassé la jambe en sautant d’un, train en marche
Et après l’hôpital, tu as été en prison pour avoir arrêté
une diligence

Et tu faisais des poésies inspirées de

Musset

San-Francisco

C’est là que tu lisais l’histoire du général

Suter qui a
conquis la

Californie aux États-Unis

Et qui, milliardaire, a été ruiné par la découverte des
mines d’or sur ses terres

Tu as longtemps chassé dans la vallée du

Sacramento
où j’ai travaillé au défrichement du sol

Mais qu’est-il arrivé
Je comprends ton orgueil
Manger le meilleur pain du district et la rivalité des
voisins 12 femmes par 1.000 kilomètres carrés

On t’a trouvé
La tête trouée d’un coup de carabine

Ta femme n’était pas là
Ta femme s’est remariée depuis avec un riche fabricant de confitures
J’ai soif
Nom de

Dieu
De nom de

Dieu
De nom de

Dieu
Je voudrais lire la

Feuille d’Avis de

Neuchâtel ou

Je
Courrier de

Pampelune

Au milieu de l’Atlantique on n’est pas plus à l’aise que
dans une salle de rédaction

Je tourne dans la cage des méridiens comme un écureuil
dans la sienne
Tiens voilà un

Russe qui a une tête sympathique

Où aller
Lui non plus ne sait où déposer son bagage
A

Léopoldville ou à la

Sedjérah près

Nazareth, chez
Mr

Junod ou chez mon vieil ami

Perl

Au

Congo en

Bessarabie à

Samoa

Je connais tous les horaires

Tous les trains et leurs correspondances

L’heure d’arrivée l’heure du départ

Tous les paquebots tous les tarifs et toutes les taxes Ça m’est égal

J’ai des adresses

Vivre de la tape
Je reviens d’Amérique à bord du

Voltumo, pour 35 francs de

New

York à

Rotterdam
C’est le baptême de la ligne
Les machines continues s’appliquent de bonnes claques
Boys
Platch
Les baquets d’eau
Un

Américain les doigts tachés d’encre bat la mesure
La télégraphie sans fil
On danse avec les genoux dans les pelures d’orange et
les boîtes de conserve vides

Une délégation est chez le capitaine

Le

Russe révolutionnaire expériences erotiques

Gaoupa
Le plus gros mot hongrois

J’accompagne une marquise napolitaine enceinte de
8 mois

C’est moi qui mène les émigrants de

Kichinef à

Hambourg

C’est en 1901 que j’ai vu la première automobile,

En panne,

Au coin d’une rue

Ce petit train que les

Soleurois appellent un fer à
repasser

Je téléphonerai à mon consul

Délivrez-moi immédiatement un billet de 3e classe

The

Uranium

Steamship

J’en veux pour mon argent

Le navire est à quai

Débraillé
Les sabords grand ouverts

Je quitte le bord comme on quitte une sale putain
En route
Je n’ai pas de papier pour me torcher
Et je sors
Comme le dieu

Tangaloa qui en péchant à la ligne tira
le monde hors des eaux

La dernière lettre de mon troisième oncle :

Papeete, le

Ier septembre 1887.

Ma sœur, ma très chère sœur

Je suis bouddhiste membre d’une secte politique

Je suis ici pour faire des achats de dynamite

On en vend chez les épiciers comme chez vous la chicorée

Par petits paquets
Puis je retournerai à

Bombay faire sauter les

Anglais Ça chauffe
Je ne te reverrai jamais plus…

Et il y avait encore quelque chose

La tristesse

Et le mal du pays.
Vagabondage
J’ai fait de la prison à

Marseille et l’on me ramène de
force à l’école

Toutes les voix crient ensemble

Les animaux et les pierres

C’est le muet qui a là plus belle parole

Pai été libertin et je me suis permis toutes les privautés
avec le monde
Vous qui aviez la foi pourquoi n’êtes-vous pas arrivé
à temps

A votre âge

Mon oncle
Tu étais joli garçon et tu jouais très bien du cornet à pistons
Cest ça qui t’a perdu comme on dit vulgairement
Tu aimais tant la musique que tu préféras le ronflement des bombes aux symphonies des habits noirs
Tu as travaillé avec des joyeux

Italiens à la construction d’une voie ferrée dans les environs de

Baghavapour
Boute en train
Tu étais le chef de file de tes compagnons
Ta belle humeur et ton joli talent d’orphéoniste
Tu es la coqueluche des femmes du baraquement
Comme

Moïse tu as assommé ton chef d’équipe
Tu t’es enfui
On est resté 12 ans sans aucune nouvelle de toi
Et comme

Luther un coup de foudre t’a fait croire à

Dieu
Dans ta solitude
Tu apprends le bengali et l’urlu pour apprendre à fabriquer les bombes
Tu as été en relation avec les comités secrets de

Londres
C’est à

White-Chapel que j’ai retrouvé ta trace
Tu es convict
Ta vie circoncise
Telle que
J’ai envie d’assassiner quelqu’un au boudin ou à la gaufre pour avoir l’occasion de te voir
Car je ne t’ai jamais vu
Tu dois avoir une longue cicatrice au front
Quant à mon quatrième oncle il était valet de chambre du général

Robertson qui a fait la guerre aux

Boërs

Il écrivait rarement des lettres ainsi conçues

Son

Excellence a daigné m’augmenter de 50 £

Ou

Son

Excellence emporte 48 paires de chaussures à la guerre
Ou
Je fais les ongles de

Son

Excellence tous les matins…
Mais je sais
Qu’il y avait encore quelque chose
La tristesse
Et le mal du pays.
Mon oncle

Jean, tu es le seul de mes sept oncles que j’aie
jamais vu

Tu étais rentré au pays car tu te sentais malade

Tu avais un grand coffre en cuir d’hippopotame qui était
toujours bouclé

Tu t’enfermais dans ta chambre pour te soigner

Quand je t’ai vu pour la première fois, tu dormais

Ton visage était terriblement souffrant

Une longue barbe

Tu dormais depuis 15 jours

Et comme je me penchais sur toi

Tu t’es réveillé

Tu étais fou
Tu as voulu tuer grand’mère

On t’a enfermé à l’hospice
Et c’est là que je t’ai vu pour la deuxième fois

Sanglé
Dans la camisole de force
On t’a empêché de débarquer
Tu faisais de pauvres mouvements avec tes mains
Comme si tu allais ramer
Transvaal
Vous étiez en quarantaine et les horse-guards avaient
braqué un canon sur votre navire

Pretoria
Un

Chinois faillit t’étrangler
Le

Tougéla
Lord

Robertson est mort
Retour à

Londres
La garde-robe de

Son

Excellence tombe à l’eau ce qui
te va droit au cœur

Tu es mort en

Suisse à l’asile d’aliénés de

Saint-Aubain

Ton entendement

Ton enterrement
Et c’est là que je t’ai vu pour la troisième fois

Il neigeait

Moi, derrière ton corbillard, je me disputais avec les
croque-morts à propos de leur pourboire

Tu n’as aimé que deux choses au monde

Un cacatoès

Et les ongles roses de

Son

Excellence
Il n’y a pas d’espérance
Et il faut travailler
Les vies encloses sont les plus denses
Tissus stéganiques
Remy de

Gourmont habite au 71 de la rue des

Saints-Pères
Filagore ou seizaine
«

Séparés un homme rencontre un homme mais une montagne ne rencontre jamais une autre montagne »
Dit un proverbe hébreu
Les précipices se croisent
Pétais à

Naples
1896
Quand j’ai reçu le

Petit

Journal

Illustré
Le capitaine

Dreyfus dégradé devant l’armée
Mon cinquième oncle :
Je suis chef au

Club-Hôtel de

Chicago
Pai 400 gâte-sauces sous mes ordres
Mais je n’aime pas la cuisine des

Yankees
Prenez bonne note de ma nouvelle adresse
Tunis etc.
Amitiés de la tante

Adèle
Prenez bonne note de ma nouvelle adresse
Biarritz etc.
Oh mon oncle, toi seul tu n’as jamais eu le mal du pays

Nice

Londres

Buda-Pest

Bennudes

Saint-Pétersbourg
Tokio

Memphis

Tous les grands hôtels se disputent tes services

Tu es le maître
Tu as inventé nombre de plats doux qui portent ton nom

Ton art
Tu te donnes tu te vends on te mange

On ne sait jamais où tu es

Tu n’aimes pas rester en place

Il paraît que tu possèdes une

Histoire de la

Cuisine à
travers tous les âges et chez tous les peuples

En 12 vol. in-8°
Avec les portraits des plus fameux cuisiniers de l’histoire

Tu connais tous les événements

Tu as toujours été partout où il se passait quelque chose

Tu es peut-être à

Paris.

Tes menus

Sont la poésie nouvelle
Pai quitté tout cela
J’attends
La guillotine est le chef-d’œuvre de l’art plastique
Son déclic
Mouvement perpétuel
Le sang des bandits
Les chants de la lumière ébranlent les tours
Les couleurs croulent sur la ville
Affiche plus grande que toi et moi
Bouche ouverte et qui crie
Dans laquelle nous brûlons
Les trois jeunes gens ardents
Hananie

Mizaël

Azarie
Adam’s

Express

Cr
Derrière l’Opéra
Il faut jouer à saute-mouton
A la brebis qui broute
Femme-tremplin
Le beau joujou de la réclame
En route!
Siméon,

Siméon
Paris-adieux
C’est rigolo
Il y a des heures qui sonnent
Quai-d’Orsay-Saint-Nazaire !
On passe sous la

Tour

Eiffel — boucler la boucle — pour
retomber de l’autre côté du monde

Puis on continue
Les catapultes du soleil assiègent les tropiques irascibles

Riche

Péruvien propriétaire de l’exploitation du guano
d’Angamos

On lance rAcaraguan

Bananan

A l’ombre

Les mulâtres hospitaliers
J’ai passé plus d’un hiver dans ces

Des fortunées
L’oiseau-secrétaire est un éblouissement
Belles dames plantureuses
On boit des boissons glacées sur la terrasse
Un torpilleur brûle comme un cigare
Une partie de polo dans le champ d’ananas
Et les palétuviers éventent les jeunes filles studieuses
My gun
Coup de feu
Un observatoire au flanc du volcan
De gros serpents dans la rivière desséchée
Haie de cactus
Un âne claironne la queue en l’air
La petite

Indienne qui louche veut se rendre à

Buenos-
Ayres

Le musicien allemand m’emprunte ma cravache à
pommeau d’argent et une paire de gants de

Suède

Ce gros

Hollandais est géographe

On joue aux cartes en attendant le train

C’est l’anniversaire de la

Malaise

Je reçois un paquet à mon nom, 200.000 pesetas et une
lettre de mon sixième oncle :

Attends-moi à la factorerie jusqu’au printemps prochain

Amuse-toi bien bois sec et n’épargne pas les femmes

Le meilleur électuaire

Mon neveu…
Et il y avait encore quelque chose

La tristesse

Et le mal du pays.
Oh mon oncle, je t’ai attendu un an et tu n’es pas venn
Tu étais parti avec une compagnie d’astronomes qui allait
inspecter le ciel sur la côte occidentale de la

Patagonie
Tu leur servais d’interprète et de guide

Tes conseils

Ton expérience
Il n’y en avait pas deux comme toi pour viser l’horizon au sextant
Les instruments en équilibre
Électro-magnétiques
Dans les fjords de la

Terre de

Feu
Aux confins du monde
Vous péchiez des mousses protozoaires en dérive entre deux eaux à la lueur des poissons électriques
Vous collectionniez des aérolithes de peroxyde de fer
Un dimanche matin :
Tu vis un évêque mitre sortir des eaux
Il avait une queue de poisson et t’aspergeait de signes de croix
Tu t’es enfui dans la montagne en hurlant comme un vari blessé
La nuit même
Un ouragan détruisit le campement
Tes compagnons durent renoncer à l’espoir de te retrouver vivant
Ils emportèrent soigneusement les documents scientifiques
Et au bout de trois mois,
Les pauvres intellectuels,
Us arrivèrent un soir à un feu de gauchos où l’on
causait justement de toi

Pétais venu à ta rencontre

Tupa
La belle nature

Les étalons s’enculent 200 taureaux noirs mugissent

Tango-argentin
Bien quoi
Il n’y a donc plus de belles histoires
La

Vie des

Saints
Dos

Nachîbuechleùi von

Schuman
Cymbàlum mundi
La

Tariffa délie

Puttane di

Venegia
Navigation de

Jean

Struys,

Amsterdam », 1528
Shalom

Aleïchem
Le

Crocodile de

Saint-Martin
Strindberg a démontré que la terre n’est pas ronde
Déjà

Gavarni avait aboli la géométrie
Pampas
Disque
Les iroquoises du vent
Saupiquets
L’hélice des gemmes
Maggi
Byrrh
Daily

Chronicle
La vague est une carrière où l’orage en sculpteur abat
des blocs de taille

Quadriges d’écume qui prennent le mors aux dents

Eternellement
Depuis le commencement du monde

Je siffle

Un frissoulis de bris
Mon septième oncle
On n’a jamais su ce qu’il est devenu
On dit que je te ressemble
Je vous dédie ce poème
Monsieur

Bertrand
Vous m’avez offert des liqueurs fortes pour me prémunir contre les fièvres du canal
Vous vous êtes abonné à l’Argus de la

Presse pour recevoir toutes les coupures qui me concernent.
Dernier

Français de

Panama (il n’y en a pas 20)
Je vous dédie ce poème
Barman du

Matachine
Des milliers de

Chinois sont morts où se dresse maintenant le

Bar flamboyant
Vous distillez
Vous vous êtes enrichi en enterrant les cholériques
Envoyez-moi la photographie de la forêt de chênes-lièges qui pousse sur les 400 locomotives abandonnées par l’entreprise fi-ançaise
Cadavres-vivants
Le palmier greffé dans la banne d’une grue chargée d’orchidées
Les canons d’Aspinwall rongés par les toucans
La drague aux tortues
Les pumas qui nichent dans le gazomètre défoncé
Les écluses perforées par les poissons-scie
La tuyauterie des pompes bouchée par une colonie d’iguanes
Les trains arrêtés par l’invasion des chenilles
Et l’ancre gigantesque aux armoiries de

Louis

XV dont vous n’avez su m’expliquer la présence dans la forêt
Tous les ans vous changez les portes de votre établissement incrustées de signatures
Tous ceux qui passèrent chez vous
Ces 32 portes quel témoignage
Langues vivantes de ce sacré canal que vous chérissez tant
Ce matin est le premier jour du monde
Isthme
D’où l’on voit simultanément tous les astres du ciel
et toutes les formes de la végétation
Préexcellence des montagnes équatoriales
Zone unique

Il y a encore le vapeur de l’Amidon

Paterson

Les initiales en couleurs de l’Adantic-Pacific

Tea-Trust

Le

Los

Angeles limited qui part à 10 h 02 pour arriver le troisième jour et qui est le seul train au monde avec wagon-coiffeur

Le

Trunk les éclipses et les petites voitures d’enfants

Pour vous apprendre à épeler l’A

B

C de la vie sous la
férule des sirènes en partance

Toyo

Kisen

Kaïsha

J’ai du pain et du fromage

Un col propre

La poésie date d’aujourd’hui
La voie lactée autour du cou

Les deux hémisphères sur les yeux

A toute vitesse

II n’y a plus de pannes

Si j’avais le temps de faire quelques économies je prendrais part au rallye aérien

J’ai réservé ma place dans le premier train qui passera
le tunnel sous la

Manche

Je suis le premier aviateur qui traverse l’Atlantique en
monocoque 900 millions
Terre

Terre

Eaux

Océans

Ciels

J’ai le mal du pays
Je suis tous les visages et j’ai peur des boîtes aux lettres

Les villes sont des ventres

Je ne suis plus les voies

Lignes
Câbles
Canaux
Ni les ponts suspendus !
Soleils lunes étoiles
Mondes apocalyptiques
Vous avez encore tous un beau rôle à jouer
Un siphon éternue
Les cancans littéraires vont leur train
Tout bas
A la

Rotonde
Comme tout au fond d’un verre
J’ATTENDS
Je voudrais être la cinquième roue du char
Orage
Midi i quatorze heures
Rien et partout

Blaise Cendrars

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