Dédicace
Maître très cher, s’il vous plaît,
Écoutez ma patenôtre.
Voici ma « Payse » : elle est
Bien peu digne de la vôtre.
Celle que chantaient vos vers
Eut les forêts pour marraines
Et gardait dans ses yeux verts
La fraîcheur des eaux lorraines.
Ce qu’en elle nous aimons,
C’est la sœur et c’est l´amie :
Au milieu des goémons
La mienne s´est endormie.
Je me suis longtemps penché
Sur son tragique visage :
L’aile noire du péché
L’avait frôlée au passage.
Et mes yeux, mes tristes yeux,
Retrouvaient dans sa prunelle
La muette horreur des lieux
Que baigne une ombre éternelle.
C’est une âme d´occident,
Farouche, intraitable et prompte.
Considérez cependant
Qu’elle est morte de sa honte.
Elle est morte au temps d’avril…
Vous oublierez tout le reste,
Maître aimé chantre viril
De la forte vie agreste,
Et vos doigts levés feront,
Quand tout espoir l’abandonne,
Indulgemment, sur son front,
Le doux signe qui pardonne.