Le passant
L’amour ne chante pas ; il ne sourit jamais,
Ni le matin, quand l’aube argente les sommets,
Ni quand l’ombre, le soir, s’épanche des collines,
Ni quand le rouge été flamboie à son midi
Et du brouillard qui dort dans l’éther attiédi
Perce et dissipe au loin les pâles mousselines.
L’amour ne chante pas ; l’amour ne sourit pas.
Il vient comme un voleur de nuit, à petits pas,
Retenant son haleine et se cachant des mères.
Il connaît que nul cœur n’est ferme en son dessein
Et qu’on ne dort jamais qu’une fois sur le sein
Vêtu par nos désirs de grâces éphémères.
L’amour ne chante pas, ne sourit pas. Ses yeux,
Brûlés de trop de pleurs, sont lourds de trop d’adieux
Pour croire qu’ici-bas quelque chose persiste.
Nul ne sait quand il vient, ni comment, ni pourquoi,
Et les cœurs ingénus qu’emplit son vague effroi
L’attendent qu’il est loin déjà, le Passant triste !