Satire, contre une dame
Sèche pièce de bois, triste ordonnance d’os,
Ventre maigre et fleuri, vieux râtelier du dos,
Portrait vif de la mort, portrait mort de la vie,
Fantôme qui paraît sous un masque trompeur,
Qui fait craindre la crainte, et fait peur à la peur,
Et détourne l’envie, à la même une envie ;
Maigre défiguré qui n’a rien que la peau,
Encores une peau qui n’est que de drapeau,
Une peau qui se fronce en cent rides altières,
Une peau dont le teint, tout cuit et tout hâlé,
Ressemble, épouvantable, au parchemin collé
Dessus un test de mort, qu’on trouve aux cimetières ;
Charogne sans couleurs, dépouille du tombeau,
Carcasse déterrée, atteinte d’un corbeau,
Semblable aux visions que nous a fait le somme :
Tu es quelque vieux corps dans la neige fondu,
Ou un corps de sorcier à un gibet pendu,
Qu’un démon a vêtu pour faire peur à l’homme !
Si quelqu’un, transporté d’un courroux violent,
Te mettait dans le ventre un flambeau tout ardent,
Pour faire de ton corps une épreuve nouvelle :
Au travers de ton flanc on verrait la clarté,
Comme dans un falot*, parmi l’obscurité,
Au travers d’une corne on voit une chandelle.
(*) lanterne