La réserve
Quand neuf baisers m’auront été promis,
Ne m’en donne que huit, et malgré ta promesse,
Soudain, échappe, ma Thaïs.
En la trompant, augmente mon ivresse :
Cours te cacher derrière tes rideaux,
Dans ton alcôve, asyle du mystère,
Sous l’ombrage de tes berceaux ;
Fuis, reparais, et ris de ma colère.
De berceaux en berceaux, de réduit en réduit,
J’épierai de tes pas la trace fugitive ;
Je t’attendrai, tu seras ma captive :
Le bonheur double alors qu’on le poursuit.
Défends toi bien, résiste avant que de te rendre ;
J’aurai beau gémir, t’accuser ;
Détourne avec art le baiser,
Quand ma bouche, avec art, sera prête à le prendre.
C’est ainsi qu’il est doux de se voir abuser.
Les huit premiers, accordés par toimême,
Mettront le comble à ma félicité ;
Mais je mourrai de plaisir au neuvième,
Et surtout s’il m’est disputé.
Les baisers