Chanson des antipodes

Claude Roy
par Claude Roy
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Être habitant des antipodes chilien aztèque patagon c’est sûrement bien mal commode (la tête en bas les congestions)

Être Koriake ou Youkaghir Abenaquis ou Algonquin Osque Khalkas Kirghiz Afghir quel embarras et quel tintouin

On n’a pas le même hémisphère Ici cligneluit Cassiopée là-bas le Centaure à l’envers l’Êridan au lieu du Bélier

On n’a pas les mêmes manières que les gens nés du bon côté Tout ce qu’on fait est de travers par rapport à l’autre moitié

Quel embarras d’avoir à dire au lieu de Claire comme ici Klkdwghlmth à Nadjnimir et Youlaloume à Grand-Mossi

Pour habiter à Ytapua (entre Salta et Portalègre) il faut dire usted se habla ou bien parler le petit-nègre

C’est un tracas de chaque jour

de se sentir si différent

de ce qu’on serait alentour

les stations Fabien et Louis-Blanc

de boire du Klass ou du m’namba au lieu du simple cinzano d’être habillé de haut en bas d’un autre corps d’une autre peau

Ah comment dit-on en romanche / love you Ich liebe Sie Comment le dire en araucanche Être un autre homme quel souci

Mais être soi en donne aussi

Il faut chaque fois tout reprendre

On se croit là On est ici

On croit qu’on sait II faut rapprendre

La tête en bas et puis en haut Le cœur jamais vraiment en place je me prends toujours en défaut quand je me croise dans la glace

J’habite aussi mes antipodes je suis un autre et je suis moi je me remaille et me débrode Pénélope de mon En-Moi

Ainsi ces vers C’était pour rire passer le temps Je m’abusai Le jeu se termine en soupirs Je n’avais cru que m’amuser

Le seul amour est ma constance et me fixe dans mon roulis quand je veux prendre mes distances avec ce Claude qui me fuit

Claude Roy dites-moi qui est-ce Je l’ai bien connu autrefois C’est un homme d’une autre espèce un visiteur que je reçois

Je m’étonne du nom qu’il porte comme du nom d’un étranger J’attends toujours qu’il glisse ou sorte de ce corps un peu mensonger

Toi seule m’habitues à vivre Que tu sois là m’a retenu et sans l’amour qui me délivre je me perdrais vite de vue

Vivre est une drôle de mode Je m’en irais par distraction du côté de mes antipodes et la clef sous le paillasson

Parti pour ne plus revenir

et n’étant plus que pour moi-même

le souvenir d’un avenir

qui s’était cru d’espèce humaine.

Claude Roy

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