La petite fille qui pleure encore

Claude Roy
par Claude Roy
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Quand tu me serres contre toi

ange évasif aux pas légers

changeant ton chaud contre mon froid

de pesanteur si soulagé

quand tu respires contre moi

tressant ton souffle avec le mien

quand tu m’emportes par le toit

soudain si libre de mes liens

dès que tu m’as fermé les yeux

de tes deux mains de velours noir

je vais pieds nus sous d’autres cieux.

Mon cœur retrouve un autre soir où je cherche une enfant perdue qui pleurait à cause de moi un jeudi soir dans l’avenue répétant mon nom à mi-voix Jeudi soir en tablier noir c’étaient les mêmes cheveux blonds mêmes joues et mêmes yeux noirs dis-moi quel goût tes larmes ont dis-moi le sel du plus d’espoir

Je reviendrai je reviendrai

Je serai mort Tu m’aimeras

A la lisière des forêts

un jeudi soir tu me verras

Je serai mort Je te dirai

ne pleure plus prends mon mouchoir

ah que tes larmes sont salées

surtout n’aie pas peur dans le noir

puisque je suis là pour t’aimer

jusqu’à la fin de la nuit noire

et de la vie et du passé

jusqu’à la fin de cette histoire

si banale et si effacée

jusqu’à la fin de notre amour

de notre amour au cœur battant

jeudi soir comme un autre jour

au fin fond d’un très ancien temps

J’essuie tes yeux de mon mouchoir tu sanglotais sous mes baisers près de l’école un jeudi soir

Et je ne suis pas consolé.

Claude Roy

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