Un soir
Avec les doigts de ma torture
Gratteurs de mauvaise écriture,
Maniaque inspecteur de maux,
J’écris encor des mots, des mots…
Quant à mon âme, elle est partie.
Morosement et pour extraire
L’arrièrefaix de ma colère,
Aigu d’orgueil, crispé d’effort,
Je râcle en vain mon cerveau mort.
Quant à mon âme, elle est partie.
Je voudrais me cracher moimême,
La lèvre en sang, la face blême :
L’ivrogne de son propre moi
S’éructerait en un renvoi.
Quant à mon âme, elle est partie.
Homme las de rage, qui rage
D’être lassé de son orage,
La vie en lui ne se prouvait
Que par l’horreur qu’il en avait.
Quant à mon âme, elle est partie.
Mes poings ont tordu dans le livre
L’intordable fièvre de vivre ;
Ils ne l’ont point tordue assez
Bien que mes poings en soient cassés.
Quant à mon âme, elle est partie.
Le han du soir suprême, écoute !
S’entend làbas sur la grand’route ;
Clos tes volets c’est bien fini
Le morsauxdents vers l’infini.
Les bords de la route