Épitaphe

(Épitaphe de la mère de l’auteur.) Épouse d’un mari doux, simple, officieux, Par la même douceur je sus plaire à ses yeux : Nous ne sûmes jamais ni railler ni médire. Passant, ne t’enquiers point si de cette bonté Tous mes enfants ont hérité ; Lis seulement ces vers, et garde-toi d’écrire.

À mes vers

(Sur leur impatience à paraître.) J’ai beau vous arrêter, ma remontrance est vaine ; Allez, partez, mes Vers, dernier fruit de ma veine. C’est trop languir chez moi dans un obscur séjour : La prison vous déplaît, vous cherchez le grand jour ; Et déjà chez Barbin, ambitieux libelles, Vous brûlez d’étaler vos feuilles criminelles….

Lettres

Simples ou parées, quelques qu’elles soient. Les lettres que nous envoyons aux femmes, Les lettres de désir et d’amour et d’espoir, C’est notre moi qui s’évade, Ce sont des êtres Qui, de toutes leurs cellules, les mots, Vont frapper les nerfs, le cœur, le cerveau, Créer de la vie étrange, inattendue. Telle qui fut écrite…

Blancheur

C’est la neige tourbillonnante Qui voltige dans l’air, mousseline vivante, La neige qui s’arma, dans l’extase du froid, D’une beauté trop loin de la vie et traîtresse. La neige pleine de caresses, Si douce au pas quand elle choit. Ceux-là dont le sang bout dans les veines, les forts, Devant la blancheur qui s’amasse Songent…

Les phares

Rubens, fleuve d’oubli, jardin de la paresse, Oreiller de chair fraîche où l’on ne peut aimer, Mais où la vie afflue et s’agite sans cesse, Comme l’air dans le ciel et la mer dans la mer ; Léonard de Vinci, miroir profond et sombre, Où des anges charmants, avec un doux souris Tout chargé de…