À celle qui aima le cloître
Tu parlais du jardin où les roses claustrales
Pour les bouquets d’autel fleurissaient doucement,
Des nonnes dans l’enclos lumineux et dormant
Cueillant des fruits au son des cloches vespérales ;
Et moi je te voyais en un calme couvent
T’asseoir, rigide et blanche, aux stalles des chapelles
Et lever vers le ciel tes mains froides et belles
Et fermer ta fenêtre au printemps décevant.
Je te vois puérile et chaste, et je devine
A ton sourire tes extases d’autrefois.
Les cantiques anciens résonnent dans ta voix,
Tu gardes dans tes yeux un peu d’ombre divine.
N’estce pas que làbas, en de mystiques soirs,
Comme moi tu songeas à des choses célestes ?
Pour toujours maintenant, ô sombre soeur, tu restes
Celle qui mit des lys aux arcs des reposoirs.
Et peutêtre souvent ta tête appesantie
S’endort sur mon épaule en regrettant le ciel,
Et mes lèvres d’amant n’ont pas assez de miel
Pour vaincre la saveur de la première hostie.
Tous les deux, nous avons trop longtemps contemplé
Les nuages en fuite et les roses du cloître,
Notre puissant amour pourra durer et croître,
Notre coeur restera divinement troublé.
Peutêtre expionsnous l’ivresse merveilleuse
D’avoir rêvé jadis à des pays meilleurs ?
Nous sommes les amants tristes parmi les fleurs
Et même le bonheur ne te fait pas joyeuse.