À un ami trahi par sa maîtresse

Évariste de Parny
par Évariste de Parny
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Quoi ! tu gémis d’une inconstance ?
Tu pleures, nouveau Céladon ?
Ah ! le trouble de ta raison
Fait honte à ton expérience.
Es-tu donc assez imprudent
Pour vouloir fixer une femme ?
Trop simple et trop crédule amant,
Quelle erreur aveugle ton âme !
Plus aisément tu fixerais
Des arbres le tremblant feuillage,
Les flots agités par l’orage,
Et l’or ondoyant des guérets
Que balance un zéphyr volage.
Elle t’aimait de bonne foi ;
Mais pouvait-elle aimer sans cesse ?
Un rival obtient sa tendresse ;
Un autre l’avait avant toi ;
Et dès demain, je le parie,
Un troisième, plus insensé,
Remplacera dans sa folie
L’imprudent qui t’a remplacé.

Il faut au pays de Cythère
À fripon fripon et demi.
Trahis, pour n’être point trahi ;
Préviens même la plus légère ;
Que ta tendresse passagère
S’arrête où commence l’ennui.
Mais que fais-je ? et dans ta faiblesse
Devrais-je ainsi te secourir ?
Ami, garde-toi d’en guérir :
L’erreur sied bien à la jeunesse.
Va, l’on se console aisément
De ses disgrâces amoureuses.
Les amours sont un jeu d’enfant ;
Et, crois-moi, dans ce jeu charmant,
Les dupes mêmes sont heureuses.

Évariste de Parny

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