Je t’aime…
I
Je t’aime et ne sais ce que je te voudrais.
Hier mes jambes douces et claires ont tremblé
quand ma gorge t’a touché, lorsque je courais.
II
Moi, le sang a coulé plus fort comme une roue,
jusqu’à ma gorge, en sentant tes bras ronds et doux
luire à travers ta robe comme des feuilles de houx.
I
Je t’aime et je ne sais pas ce que je voudrais.
Je voudrais me coucher et je m’endormirais…
La gentiane est bleue et noire à la forêt.
II
Je t’aime. Laisse-moi te prendre dans mes bras…
La pluie luit au soleil sur les arbres du bois…
Laisse-moi t’endormir et tu m’endormiras.
I
J’ai peur. Je t’aime et ma tête tourne, pareille
aux ruches du vieux banc où sonnaient les abeilles
qui revenaient gluantes des raisins des treilles.
II
Il fait chaud. Les blés sont remplis de fleurs rouges.
Couche-toi dans les blés et donne-moi ta bouche.
Les mouches bleues au bas de la prairie — écoute ?
I
La terre est chaude. Il y a là-bas des cigales
près du vieux mur où sont des roses du Bengale,
sur l’écorce blanche et rugueuse des platanes.
II
La vérité est nue et mets-toi nue aussi.
Les épis crépiteront sous ton corps durci
par la jeunesse de l’amour qui le blanchit.
I
Je n’ose pas, mais je voudrais être nue ce soir…
Mais tu me toucherais et j’aurais peur de toi.
Je serais toute blanche et le soir serait noir.
II
Les geais ont crié dans le bois, car ils aiment.
Les capricornes luisants s’accrochent aux chênes.
Les abeilles qui aiment les longs vols blonds essaiment.
I
Prends-moi entre tes bras. Je ne peux plus qu’aimer
et ma chair est en air, en feu et en lumière,
et je veux te serrer comme un arbre un lierre.
II
Les troupeaux de l’Automne vont aux feuilles jaunes,
la tanche d’or à l’eau et la beauté aux femmes
et le corps va au corps et l’âme va à l’âme.