Le vent triste…

Francis Jammes
par Francis Jammes
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À Henri Ghéon.
Le vent triste souffle dans le parc,

comme dans un livre que je lus enfant,

où une écolière perdue était hagarde.

Le vent.
Il va casser, peut-être, le tulipier.

Il fait voir le dessous des feuilles blanc

du vernis du Japon qu’il semble essuyer,

Le vent.
Le baromètre est descendu subitement.

Peut-être que ça va être un ouragan.

Il ne peut pas pleuvoir, mais on entend

Le vent.
Dans les livres de prix, monsieur et madame d’Arvan

reviendraient en pressant le pas chez eux,

vers un château tout bleu malgré le mauvais temps.

Le vent.
Sortez de ma tête, ô manoirs moisissants

où devaient se passer d’étranges adultères,

par les temps tristes, en Angleterre.

Le vent.
Sortez de ma tête, gentilles écolières

qui jouiez à cache-cache dans la clairière

et reveniez vers le grenier sombre, à cause du grand

vent.
Sortez de ma tête, vieux marquis des villes

qui, dans les maisons pluvieuses, lisiez Virgile

dans des fauteuils à oreillettes, par des temps

de vent.
Sors de ma tête, ma douce tristesse,

et va-t’en vers le coteau fané, va-t’en

où va, sur un air un peu Chateaubriand,

le vent.

Francis Jammes

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