Pastourelle
L’autre jour, par un beau matin
Passant les hauteurs d’un coteau
Je vis auprès d’un aubepin
Une fille ornée de soleil.
Elle ressemblait à s’y méprendre
A une aimée d’autrefois.
Je fis un détour vers elle.
Rieuse, elle me salua.
Alors, joyeux, je descendis
De mon cheval. À peine à terre,
Elle prit ma main, me fit asseoir À l’ombre tendre d’un tilleul
Sans poser la moindre question. Étais-je ou non connu d’elle ?
Mais bien sûr!
Pourquoi mentir?
Elle baisa mes yeux, mon front.
Je crus défaillir de plaisir
Quand ses beaux cheveux m’effleurèrent.
–
Vous ici, belle ?
Assurément,
Dieu a voulu notre rencontre !
–
Oui seigneur,
II nous réunit.
Je ne désirais rien d’autre ;
Je vous prie, bien me plairait
Le jeu d’amour interdit !
–
Amie, si je devine bien
J’aurais grand tort de me plaindre.
Vous me montrez tant de bonté
Que je veux vous dire un secret :
Amour m’a repris son cadeau,
Celle qui tant me plaisait
Est partie je ne sais où
Et j’en suis inconsolé.
–
Seigneur j’entends et je comprends
Mes nuits ne sont que veilles tristes
Depuis que vous m’avez quittée
Le sommeil déserte mes yeux.
L’amour qui tant vous éloigna
Me fit souffrir.
C’est fini.
Puisque notre compagnie
N’en sera que plus plaisante.
–
Mon amie c’est ma bonne étoile
Qui m’a conduit auprès de vous
Pour m’éjouir de pré en lit.
–
Votre joie est mienne.
Merveille !
Pour vous et pour moi tout est bien.
Grâce à nous deux aucun lieu
N’attire ailleurs nos désirs.
Le dieu d’Amour visa juste !
Eve, seigneur a transgressé
L’interdit qu’on lui avait fait.
Qui me blâmerait d’être à vous
Perdrait son temps en vains babils !