L’obscurité, dans les chambres, le soir…
L’obscurité, dans les chambres, le soir, est une
Irréconciliable apporteuse de craintes ;
En deuil, s’habillant d’ombre et de linges de lune,
Elle inquiète ; elle a de félines étreintes
Comme une eau des canaux traîtres où l’on se noie
L’obscurité, c’est la tueuse de la joie
Qui dépérit, bouquet de roses transitoires,
Quand elle y verse un peu de ses fioles noires.
L’obscurité s’installe avec le crépuscule ;
Elle descend dans l’âme aussi qui s’enténèbre ;
Sur le miroir heureux tombe un crêpe funèbre
La clarté, diraiton, est blessée et recule
Vers la fenêtre où s’offre un linceul de dentelle.
L’ombre est un poison noir, d’une douceur mortelle !
Et voici qu’on frémit d’on ne sait quoi… c’est l’heure
Où le vol libéré des âmes nous effleure ;
Ah ! Quel trouble ! Et les peurs, les peurs dominatrices
Dans les rideaux des lits agitant des fantômes !
Et ces sachets du linge aux sensuels arômes !
Et les lampes, làbas, rouvrant leurs cicatrices,
Qui vont recommencer à faire saigner l’ombre !
Mais l’ombre se défend contre les lampes frêles,
Epaississant dans les angles sa force sombre
On écoute les moucherons griller leurs ailes…
Et l’on soupçonne, à voir mourir les bestioles,
Que c’est l’obscurité qui se venge ainsi d’elles
Pour avoir aimé mieux que ses noires fioles
Le soleil qui revit dans les lampes fidèles !
Le règne du silence