Vents du Midi, soufflez
Couvrez nos monts, sombres nuages !
Voilez ces rochers et ces bois ;
Soufflez au ciel, vents des orages,
Comme dans mon cœur autrefois !
Les vieux pas, les traces nouvelles,
Sur mon chemin, effacez-les !
Je crois aux amours éternelles ;
Passez, vents du midi ! soufflez !
Mais le morne brouillard des cimes
Cache la terre et non le ciel ;
Du ciel les lumineux abîmes
Font pâlir le monde réel.
Et moi, saisi d’an saint vertige,
Je suis mes oiseaux envolés ;
La fleur se brise sur sa tige ;
Passez, vents du midi ! soufflez !
Je vois l’épervier dans la nue
Loin de la terre s’oublier ;
J’entends l’avalanche imprévue
Se détacher de son glacier ;
Ce qui croule, ce qui s’élève,
Voilà nos destins révélés !
L’éternité n’est point un rêve ;
Passez, vents du midi ! soufflez !
Et quand, sous l’ombrage éphémère
De quelque arbuste aux verts rameaux,
Je croirais trouver sur la terre
Les biens promis, l’oubli des maux ;
Réveillez-vous, vents des tempêtes !
Feuille à feuille dispersez-les !
Que les cieux seuls couvrent nos têtes,
Passez, vents du midi ! soufflez !