Chanson (3)
Adieu, ville, vous command ;
Il n’est plaisir que des champs.
L’autre hier, trouvai Sylvette,
Son petit troupeau gardant :
Quand je la trouvai seulette,
S’amour allai demandant.
Adieu, ville, vous command ;
Il n’est plaisir que des champs.
‘A quoi pensezvous, bergere
En cette fleur de quinze ans?
La beauté passe légere,
Comme la rose au printemps.
‘Adieu, ville, vous command ;
Il n’est plaisir que des champs.
‘Fille qui ne fait ami
De tout son desir content,
On ne fait cas ni demi
De son teint, de son corps gent.’
Adieu, ville, vous command ;
Il n’est plaisir que des champs.
‘Il vous donnera ceinture
Demiceint ferré d’argent,
Rouge cotte, et la doublure
Plus que l’herbe verdoyant.’
Adieu, ville, vous command ;
Il n’est plaisir que des champs.
‘À la feste aurez la danse
Et le joyau triomphant.’
Lors vis à sa contenance
Qu’elle s’alloit échauffant.
Adieu, ville, vous command ;
Il n’est plaisir que des champs.
Répond qu’elle est si jeunette,
Que n’entend mon preschement ;
Mais qu’on dit qu’en amourette
N’y a que peine et tourment.
Adieu, ville, vous command ;
Il n’est plaisir que des champs,
Depuis, l’épie au passage,
Tant que la trouvai filant
À l’orée du bocage,
Près de son troupeau beslant.
Adieu, ville, vous command ;
Il n’est plaisir que des champs.
‘Dieu gard’, dis, la filandiere,
Et celui qui la surprend ! ‘
Elle regarde derriere,
Et un doux salut me rend.
Adieu, ville, vous command ;
Il n’est plaisir que des champs.
‘Voici un chapeau de paille,
Un couvrechef tavolant ;
Combien que le don peu vaille,
Le coeur est franc et vaillant.’
Adieu. ville. vous command ;
Il m’est plaisir que des champs.
Je l’affuble, et lui déclaire
Que de soif allois mourant ;
Me moue à la source claire,
Où lui dis le demeurant:
Adieu, ville, vous command ;
Il n’est plaisir que clos champs.