Le Havre morte-ville
Le Havre morte-ville
Il ne me reste rien de toi
Tu lègues ta gloire à des monstres
Il ne reste rien
Ni de Guillaume Tell
Ni du café Prader ni du café Gustave
Ni du café de la poste
L’on chercherait en vain
Jules Tellier et son buste
Dans le square défoncé
Démente horreur
Moi je t’ai connue
Morte-ville
Qui lègue ta gloire à des monstres
Et j’habite tes ruines
J’habite la mitraille
Et mon premier amour n’est plus
N’est plus que sarcasmes
Mon premier amour -Pension Mimosa-
Café de la Chaussée, hôtel de Chillou
Mon premier amour n’est plus que pleurs et larmes
Tu étais nue si belle mon cœur battait
Et le bruit de la mer
Berceuse et furie l’eau des larmes
L’eau des regrets
Qui me reconnaîtra parmi les monstres
Je reviendrai
Je ne serai plus qu’une ombre
Tu es morte
Comme Dieu est mort en moi et je suis crucifié
Cité morte je suis ravagé
Le vent souffle la pluie ruisselle
Et ce qu’elle dit est comme ta voix à dix-huit ans
Ta voix de petite fille blessée
Mais Dieu est mort en moi
Cité morte
Et notre amour est mort.
Sanatorium de Sainte-Feyre, 5 avril 1951