Charmes de londres
«
Love
Love is money chéri »
Vénus sortie de l’onde à
Newhaven venant de
Dieppe
via
Saint-Lazare
Paris
Vénus tout à l’heure
a frôlé ce marin maintenant endormi
sur les marches du temple élevé en plein air
à la vie de l’amour à l’amour de la vie
Et le marin a le mauvais sommeil
«
Love
Love is money chéri »
Mais Éros le prend sous son aile et lui dit
Qu’est-ce que tu veux c’est le refrain c’est la rengaine
des sirènes de l’ombre
des pauvres reines de la nuit
à
Londres comme ailleurs ailleurs comme à
Paris
Elles vivent de leurs charmes pourquoi en faire un drame
de quoi veux-tu qu’elles vivent ces pauvres petites souris
et c’est
Mercure qui fait les prix . à quoi bon te casser la tête tout ça c’est de la
Mythologie
Et le marin dans son sommeil sourit
Eros veille sur lui
comme il veille sur
Auguste à la recherche de
Narcisse dans les derniers feux de la piste de
Piccadilly
Circus
où le bel adolescent vêtu de haillons noirs et fort bien coupés sous le manteau offre à qui sait les voir les mille et un portraits de
Dorian
Gray.
II
Eau
eau des jets d’eau.
eau des miroirs d’eau
eau des viviers des fleuves des ruisseaux des éviers
et des bassins des hôpitaux
eau des puits très anciens et des pluies torrentielles
eau des écluses et des quais de halage
eau des horloges et des naufrages
eau à la bouche
eau des yeux grands ouverts sombres et lumineux
eau des terres de glaces et des mers de feu
eau des usines et des chaudières
des cuisines et des cressonnières
eau douce des navires eau vive des locomotives
u courante
u rêveuse vertigineuse „su scabreuse eau dormante réveillée en sursaut eau des typhons des mascarets des robinets des raz de marée des lames de fond eau des carafes sur les guéridons eau des fontaines et des abreuvoirs
Eau
quand tu danses à
Londres en été dans le noir
tes feux follets racontent une si triste histoire
une si vieille histoire comme la
Tamise en raconte
aux enfants
Feux follets d’Ophélie
Folie du pauvre
Hamlet
Dans un ruisseau de larmes une fleur s’est noyée
Dans un ruisseau de sang le soleil s’est couché
quelque chose de pourri voulait le consoler
Oh folie
os fêlés
le cimetière est désert
les tombes dépareillées
Orphéons et
Fanfares jouez-nous encore une fois
cet air fou d’autrefois
cet air si déchirant enluminant le
Temps
Oh folie os fêlés
Dans sa boîte crânienne au couvercle doré un prince s’est enfermé
Dans sa cage cérébrale il ne cesse de tourner
Une folle fille d”Éros voudrait le délivrer
Si la cage est fragile les barreaux sont solides elle a beau les secouer
Oh folie d’Ophélie os fêlés dUamlet.
III
Que voulez-vous quand plafond trop noir quoi bon lever les yeux plafond
Stop
Autant cogner tête contre muraille du son
Stop
Sommes pas seuls ennuyés
Stop
Amis héréditaires dernières hostilités grosses difficultés
Stop
Ennuis de nos amis sont aussi nos amis enfin me comprenez
Stop
Malle des
Indes en souffrance ainsi de suite et j’en passe
Stop mais bien considérer bombes atomiques sommeil valises diplomatiques
Stop
Industries des
Réveils prête à intervenir
Stop
Cas regrettable éventualité nouveau feu artifice mondial agir avec doigté pour éviter bouquet
Stop
D’accord votre objection millions vies humaines pas à négliger mais
Intérêt
Supérieur prime sur le
Marché
Stop
Sang versé
Trésorerie sera toujours très honoré
Au cas beaucoup trop d’œufs dans omelette flambée
Verser profits et pertes comme par le passé
Stop.