Les mystères de la chambre noire
Deux valets à l’envers
deux plats valets aux noirs cheveux blancs
secouent la tête en toute humidité
négativement
Et puis tout à coup
Oh mystère de la duplicité de la technicité
entr’ouvrant les volets verts
de la chambre noire
ils se redressent et ils se marrent
positivement
Ne bougeons plus
c’est l’heure où la goutte d’eau
qui fait déborder le vase
tombe dans le bec de l’hirondelle
qui ne fait pas le printemps
Ne bougeons plus
le petit oiseau va sortir de sa poche
de bien singuliers documents
révélateurs compromettants
Le papier est sensible
mais la nature l’est encore davantage
Et comme il est sensible lui aussi
Ce petit paysage du
Midi
a midi
et plein d’impudeur avec ça
Regardez comme il retrousse
sa douce robe de terre roussie
pour montrer ses plus sombres dessous
à ses véritables amis
Coulisses du théâtre de verdure
oubliettes aux anciens décors
vestiges de très vieux incendies de forêts
depuis déjà longtemps calcinématographiés
par la nature elle-même
toujours en avance quand il s’agit de s’amuser
en société
Et ce petit météore s’il reste là figé
comme sur un chromo l’étoile des
Rois
Mages
(en haut à gauche d’une autre de ces images)
c’est simplement
pour attirer poliment votre attention
sur la suite de documentation
et plus particulièrement
sur ce débardeur aux longues branches
(même image dans le coin de droite)
cet arbre au torse nu
secouant dans la poussière de la route
le délirant feuillage de son cuir chevelu
Et sur une autre image encore
l’image même du mauvais goût
les plus humbles des récipients
les parents pauvres de la poterie
qui servent encore d’aliment
aux incurables plaisanteries
des vieilles dames des sacristies
voilà qu’ils apparaissent maintenant
incognito et embellis
comme de somptueuses fleurs d’émail
enlisées dans la vase de la nuit
Et ce village
ce village que le photographe croyait sage comme
une image
le voilà (sur une autre image)
Tout frémissant et qui s’agite
et se gondole littéralement
au nez d’une certaine sorte de gens
fous furieux de voir qu’il ressemble
insolemment et indéniablement
à cette « fameuse toile » de
Soutine
ou d’un autre de ces vauriens
qui systématiquement s’obstinent
à peindre des choses…
des choses qui ne ressemblent absolument à rien!