Mortels, qui des mortels avez pris vostre vie
Mortels, qui des mortels avez pris vostre vie,
Vie qui meurt encor dans le tombeau du Corps,
Vous qui r’amoncelez vos tresors, des tresors
De ceux dont par la mort la vie fust ravie :
Vous qui voyant de morts leur mort entresuivie,
N’avez point de maisons que les maisons des morts,
Et ne sentez pourtant de la mort un remors,
D’où vient qu’au souvenir son souvenir s’oublie ?
Estce que votre vie adorant ses douceurs
Deteste des pensers de la mort les horreurs,
Et ne puisse envier une contraire envie ?
Mortels, chacun accuse, et j’excuse le tort
Qu’on forge en vostre oubli. Un oubli d’une mort
Vous monstre un souvenir d’une éternelle vie.