Les germes
O nuit frappée de cécité,
O toi qui vas cherchant, même à travers le jour,
Les hommes de tes vieilles mains trouées de miracles,
Voici les germes espacés, le pollen vaporeux des
mondes,
Voici des germes au long cours qui ont mesuré tout
le ciel
Et se posent sur l’herbe
Sans plus de bruit
Que le caprice d’une
Ombre qui lui traverse l’esprit.
Ds échappèrent fluides au murmure enlisé des
mondes
Jusqu’où s’élève la rumeur de nos plus lointaines
pensées,
Celles d’un homme songeant sous les étoiles écou-
teuses
Et suscitant en plein ciel une ronce violente,
Un chevreau tournant sur soi jusqu’à devenir une étoile.
Ils disent le matelot que va disperser la tempête,
Remettant vite son âme au dernier astre aperçu
Entre deux vagues montantes,
Et, dans un regard noyé par la mer et par la mort,
Faisant naître à des millions horribles d’années-lumière
Les volets verts de sa demeure timidement entr’ou-verts
Comme si la main d’une femme allait les pousser du dedans.
Et nul ne sait que les germes viennent d’arriver près de nous
Tandis que la nuit ravaude
Les déchirures du jour.