Retour a paris
Je voudrais vivre de mes souvenirs à petites bouffées et que ne seraient-ils la rente fumeuse de mes voyages.
Mais ils veulent que je m’occupe d’eux tous en même temps.
Heureux celui qui dit :
Entrez! et ne voit s’avancer qu’un seul souvenir très déférent.
Voici des images de tous les formats, retour de voyage, des tiroirs qui n’entrent pas tous dans les vides de mes
vieilles commodes, un bois de cèdres au naturel,
des troupeaux de moutons coulant comme des fleuves, des cataractes effroyables qui semblent tomber de
l’au-delà, et une pampa près de quoi la véritable n’est qu’un bout de terrain vague des environs de
Paris.
Comme je serais heureux d’envoyer le tout chez
l’encadreur, et qu’il n’en soit plus question!
Mais peut-être m’habituerai-je à ces choses de toute
les tailles que je porte en moi et autour de moi
et finirai-je par montrer l’embonpoint moral
de la marchande de l’avenue du
Bois
qui a de grands et de petits cerceaux
et du réconfort pour tous les âges!
Voici venir des charpentiers,
des égorgeurs,
des sages-femmes.
Entrez, mes chers metteurs en ordre,
je ne vous demande qu’une grâce,
ne touchez pas à ce que j’appellerai mon âme,
accessoire trop délicat pour vos grosses mains
ouvrières, ni à mon casque des colonies qui me fut donné par une famille d’indigènes un dimanche, sous l’équateur, ne touchez pas à ces choses
je vais repartir.