Le Retour aux champs

Léon-Pamphile Le May
par Léon-Pamphile Le May
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Enfin j’ai secoué la poussière des villes ;
J’habite les champs parfumés.
Je me sens vivre ici, dans ces cantons tranquilles,
Sur ces bords que j’ai tant aimés.

L’ennui me consumait dans tes vieilles murailles,
O noble cité de Champlain !
Je ne suis pas, voistu, l’enfant de tes entrailles,
Je ne suis pas né châtelain.

Je suis né dans les champs ; je suis fils de la brise
Qui passe en caressant les fleurs ;
Je souris à la digue où le torrent se brise
Avec d’impuissantes clameurs.

Mes premières amours, douces fleurs des vallées,
N’ontelles pas été pour vous ?
Pour vous, rocs au front nu, forêts échevelées,
Vagues des fleuves en courroux ?

Pour vous, petits oiseaux qui semez, à l’aurore,
Les doux accords de votre voix ?
Et pour vous, diamants qu’égrène un vent sonore,
Après l’orage, sous les bois ?

Je souffrais dans ces murs où s’entasse la foule,
Où l’herbe ne reverdit pas,
Où la fleur s’étiole, où la poussière roule
Comme pour effacer nos pas.

J’avais bien assez vu comme le fort repousse
Le faible à son boulet rivé,
Comme de son orgueil la sottise éclabousse
L’esprit qui monte du pavé.

Nul vent harmonieux ne passait sur ma lyre,
Et mes chants étaient suspendus.
Je ne retrouvais point le souffle qui m’inspire,
Et je pleurais les jours perdus.

Il me fallait revoir, au milieu de la plaine,
Ou sur le penchant du coteau,
Le laboureur qui rêve à la moisson prochaine
En ouvrant un sillon nouveau.

Il me fallait l’odeur du foin qui se dessèche
Sur le sol où passe la faux,
L’odeur du trèfle mûr que flairent dans la crèche,
En hennissant, les fiers chevaux.

Il me fallait le jour, pour voir combien de voiles
S’ouvrent blanches sur le flot bleu ;
Il me fallait la nuit, pour voir combien d’étoiles
S’allument sous les pieds de Dieu.

Il me fallait encore entendre l’harmonie
Des nids que berce le rameau,
Il me fallait entendre encor la voix bénie
Des vieux clochers de mon hameau,

Léon-Pamphile Le May

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