La Combe

Louisa Siefert
par Louisa Siefert
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En vain elle s’est dit que la campagne est belle.

Sainte-Beuve.

Non, plus pour aujourd’hui, plus de grandes pensées,

De saintes questions à la hâte embrassées,

D’énergiques efforts, d’élans fiers et hardis.

Mon esprit est lassé, mes doigts sont engourdis.

L’automne est la saison des rêves, nous y sommes,

Elle parle ; rêvons, et laissons là les hommes,

Leur bruit et leur destin. Prenons à notre choix

L’un des sentiers fleuris qui mènent dans les bois.

Les colchiques aux prés, les bruyères aux pentes

Ont semé leurs bouquets sur les mousses rampantes.

L’âcre odeur de la menthe et du genévrier

Se répand ; et l’oiseau qui va s’expatrier,

Triste des longues nuits déjà froides, murmure

Comme un adieu plaintif sous l’humide ramure.

On a cassé les noix et foulé le raisin ;

Et chantant le vieil air qui doit charmer l’essaim,

On a volé leur miel aux abeilles jalouses.

L’ombre oblique des bois descend sur les pelouses ;

Il fait bon cheminer à petits pas, cherchant

Un vers dans sa mémoire et l’alouette au champ.

Il fait bon s’attarder le long de la ravine

Comme l’humble ruisseau que l’oreille y devine,

Et qui s’y perd cent fois de crainte d’arriver ;

Il y fait bon s’asseoir au soleil et rêver.

Car l’arrière-saison est clémente aux poètes,

Et, mieux que le printemps aux ardeurs inquiètes,

Mêle aux songes trop chers un doux apaisement.

Les songes ! mais pourquoi toujours eux ? — Vainement

Aujourd’hui je voudrais en avoir les mains pleines

Et les jeter aux vents, aux cieux, aux flots, aux plaines,

Rouge de ma faiblesse et n’y résistant pas,

Vainement je les glane et les pleure tout bas,

Ô derniers épis d’or de la moisson coupée ! —

Je ne puis oublier combien ils m’ont trompée.

Et, le charme une fois rompu, les bois sont sourds,

Les colchiques muets, les sentiers sans détours ;

Je ne sais plus saisir le sens caché des choses,

Et la vie assombrit les lointains les plus roses.

Louisa Siefert

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