Voyant ces monts de veue ainsi loingtaine
Voyant ces monts de veue ainsi lointaine
Je les compare à mon long desplaisir.
Haut est leur chef, et hault est mon desir,
Leur pied est ferme et ma foy est certaine.
D’eux mainct ruisseau coule et mainte fontaine,
De mes deux yeulx sortent pleurs à loisir ;
De forts souspirs ne me puis dessaisir,
Et de grands vents leur cime est toute plaine.
Mille troupeaux s’y promènent et paissent,
Autant d’amours se couvent et renaissent ;
Dedans mon coeur, qui seul est leur pasture.
Ils sont sans fruict, mon bien n’est qu’apparence,
Et d’eulx à moy n’a qu’une difference,
Qu’en eux la neige, en moy la flamme dure.