Plaintes contre les Tuileries
Agréables jardins où les Zéphyrs et Flore
Se trouvent tous les jours au lever de l’Aurore ;
Lieux charmants qui pouvez dans vos sombres réduits,
Des plus tristes amants adoucir les ennuis,
Cessez de rappeler, dans mon âme insensée,
De mon premier bonheur la gloire enfin passée.
Ce fut, je m’en souviens, dans cet antique bois
Que Philis m’apparut pour la première fois.
C’est ici que souvent, dissipant mes alarmes,
Elle arrêtait d’un mot mes soupirs et mes larmes.
Et que me regardant d’un œil si gracieux,
Elle m’offrait le ciel, ouvert dans ses beaux yeux.
Aujourd’hui cependant, injustes que vous êtes,
Je sais qu’à mes rivaux vous prêtez vos retraites,
Et qu’avec elle assis sur vos tapis de fleurs,
Ils triomphent contents de mes vaines douleurs.
Allez, jardins dressés par une main fatale,
Tristes enfants de l’art du malheureux Dédale,
Vos bois, jadis pour moi si charmants et si beaux ;
Ne sont plus qu’un désert, refuge des corbeaux ;
Qu’un séjour infernal où cent mille vipères,
Tous les jours, en naissant, assassinent leurs mères.