Avecques mon amour naît l’amour de changer
Avecques mon amour naît l’amour de changer.
J’en aime une au matin ; l’autre au soir me possède.
Premier qu’avoir le mal, je cherche le remède,
N’attendant être pris pour me désengager.
Sous un espoir trop long je ne puis m’affliger ;
Quand une fait la brave, une autre lui succède ;
Et n’aime plus longtemps la belle que la laide :
Car dessous telles lois je ne veux me ranger.
Si j’ai moins de faveur, j’ai moins de frénésie ;
Chassant la passion hors de ma fantaisie,
À deux, en même jour, je m’offre et dis adieu.
Mettant en divers lieux l’heur de mes espérances,
Je fais peu d’amitiés et bien des connaissances ;
Et me trouvant partout je ne suis en nul lieu.