Passer le Temps
Un enfant grimpe à l’homme
Qui dit jeune dit seul
Comme une page blanche
Puisque tout a la force de la nouveauté
Un enfant retentit du cri commun aux solitaires
Engagés douloureusement
Sur de longues artères d’ombre
II prend soin de crier
Mais son cri est pareil à cette bombe de froid qu’on
n’entend pas exploser
Pareil à cette bombe de larmes qu’on ne voit pas
couler
Pluie espérée pluie en puissance
Grande pluie meurtrière
De blés cassants comme des cruches
Sur mes colères
J’ignore toujours mon destin
Fillette aux seins de soie
Ai-je vieilli
Midi minuit je m’endors je m’éveille
En caressant tout doucement
Une bonne loutre vertueuse
Qui résiste à tous les poisons.
Paul Eluard