Caprice

Paul Verlaine
par Paul Verlaine
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Ô poète, faux pauvre et faux riche, homme vrai,
Jusqu’en l’extérieur riche et pauvre pas vrai,
(Dès lors, comment veux-tu qu’on soit sûr de ton cœur ?)
Tour à tour souple drôle et monsieur somptueux,
Du vert clair plein d’ « espère » au noir componctueux,
Ton habit a toujours quelque détail blagueur.

Un bouton manque. Un fil dépasse. D’où venue
Cette tache — ah ça, malvenue ou bienvenue ? —
Qui rit et pleure sur le cheviot et la toile ?
Nœud noué bien et mal, soulier luisant et terne.
Bref, un type à se pendre à la Vieille Lanterne
Comme à marcher, gai proverbe, à la belle étoile,

Gueux, mais pas comme ça, l’homme vrai, le seul vrai,
Poète, va, si ton langage n’est pas vrai,
Toi l’es, et ton langage, alors ! Tant pis pour ceux
Qui n’auront pas aimé, fous comme autant de tois,
La lune pour chauffer les sans femmes ni toits,
La mort, ah, pour bercer les cœurs malechanceux,

Pauvres cœurs mal tombés, trop bons et très fiers, certes !
Car l’ironie éclate aux lèvres belles, certes,
De vos blessures, cœurs plus blessés qu’une cible,
Petits sacrés-cœurs de Jésus plus lamentables !
Va, poète, le seul des hommes véritables,
Meurs sauvé, meurs de faim pourtant le moins possible.

Paul Verlaine

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