La mort
Telle qu’un moissonneur, dont l’aveugle faucille
Abat le frais bleuet, comme le dur chardon,
Telle qu’un plomb cruel qui, dans sa course, brille,
Siffle, et, fendant les airs, vous frappe sans pardon ;
Telle l’affreuse mort sur un dragon se montre,
Passant comme un tonnerre au milieu des humains,
Renversant, foudroyant tout ce qu’elle rencontre
Et tenant une faulx dans ses livides mains.
Riche, vieux, jeune, pauvre, à son lugubre empire
Tout le monde obéit ; dans le cœur des mortels
Le monstre plonge, hélas ! ses ongles de vampire !
Il s’acharne aux enfants, tout comme aux criminels :
Aigle fier et serein, quand du haut de ton aire
Tu vois sur l’univers planer ce noir vautour,
Le mépris (n’est-ce pas, plutôt que la colère)
Magnanime génie, dans ton cœur, a son tour ?
Mais, tout en dédaignant la mort et ses alarmes,
Hugo, tu t’apitoies sur les tristes vaincus ;
Tu sais, quand il le faut, répandre quelques larmes,
Quelques larmes d’amour pour ceux qui ne sont plus.