L’écartement des bras

Paul Verlaine
par Paul Verlaine
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L’écartement des bras m’est cher, presque plus cher
Que l’écartement autre :
Mer puissante et que belle et que bonne de chair,
Quel appât est la vôtre !

Ô seins, mon grand orgueil, mon immense bonheur,
Purs, blancs, joie et caresse,
Volupté pour mes yeux et mes mains et mon cœur
Qui bat de votre ivresse,

Aisselles, fins cheveux courts qu’ondoie un parfum
Capiteux où je plonge,
Cou gras comme le miel, ambré comme lui, qu’un
Dieu fit bien mieux qu’en songe.

Fraîcheur enfin des bras endormis et rêveurs
Autour de mes épaules,
Palpitantes et si doux d’étreinte à mes ferveurs
Toutes à leurs grands rôles,

Que je ne sais quoi pleure en moi, peine et plaisir.
Plaisir fou, chaste peine,
Et que je ne puis mieux assouvir le désir
De quoi mon âme est pleine

Qu’en des baisers plus langoureux et plus ardents
Sur le glorieux buste
Non sans un sentiment comme un peu triste dans
L’extase comme auguste !

Et maintenant vers l’ombre blanche — et noire un peu,
L’amour il peut détendre
Plus par en bas et plus intime son fier jeu
Dès lors naïf et tendre !

Paul Verlaine

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